07/03/2013
art africain
- Photo Galerie Alain Lecomte -
Je partage deux choses avec mon ami Alain Lecomte, l'amour du jazz (c'est un fin connaisseur et un engrangeur de disques vinyls, il adore les pochettes) et une passion sans borne pour l'art africain. Lui en connaît un rayon, il est même devenu expert en la matière et sa galerie à Paris est bourrée de mystères, d'objets étonnants à la beauté rare. Avant qu'il n'ait ouvert cet espace pour donner libre court à sa passion, nous nous sommes beaucoup vu et avons beaucoup échangé. J'étais complètement ignare sur cet art mais d'une façon irrésistible et viscérale j'étais attirée par lui. Quand j'ai rencontré Alain (un jour il a poussé la porte de ma boutique, j'en ai déjà parlé ici) le courant est vite passé. Quelques objets l'avaient séduits, une poupée Ashanti et aussi une échelle Dogon, au fond du magasin. Il est entré en relation avec moi très directement, me demandant ce que j'aimais dans cet objet. Je me souviens bien, sa question m'avait scotchée parce que je ne l'étais jamais posée! J'aimais cette échelle pour son aspect brut et sculpurale et pour sa texture aussi, un bois de fer patiné par le temps, poli d'un côté et écorce de l'autre. Un objet puissant. J'avais aussi à l'époque près du comptoir, une chaise Baoulé et un tabouret Ashanti considéré comme un symbole de prestige sur lequel j'aimais m'asseoir (je l'ai toujours d'ailleurs mais il a émigré chez moi et c'est toujours vers lui que je me pose quand je reçois des amis). Et là cet homme que je voyais pour la première fois commence à me raconter des histoires de tribu, de rites, de paysages, de son amour de l'art, de sa collection personnelle complètement dingue (je l'ai découverte par la suite) et de son désir profond d'ouvrir une galerie. Je lui propose de but en blanc, de faire une expo déjà dans le cadre de mon espace, ainsi il pourrait tâter du terrain! C'est comme cela que notre amitié est née. Il est revenu quelques mois plus tard avec une caisse de trésors à la main: serrures bambara, poulies sénoufo, masque Punu, masque Fang, masque Dan, Dogon-Kanaga, jumeaux Ewé, appuie-nuque, bijoux, velours Kassaï, j'étais emerveillée... J'ai encore avec moi certains de ces objets, j'aurai du mal à m'en séparer. Léopold Sédar Senghor a écrit: " En entrant dans l’univers de l’art nègre, le voyageur ne découvre pas un monde nouveau qui pourrait seulement rapetisser son univers mais y découvrir un nouveau domaine merveilleux dont un homme semblable à lui, un frère noir, lui remet la clé. Cette clé, c’est l’esthétique de l’Afrique noire : la conception noire de l’Univers". Peut-être est-ce cela qui m'attirait dans cet art, m'ouvrir à un autre monde, sortir du mien? Possible. En tout cas ma rencontre avec cet art fut vraiment thérapeutique. J'y ai trouvé un sens, une symbolique et une fécondité esthétique fascinante. Et puis, ces objets qui me suivent maintenant dans ma vie depuis un petit bout de temps, m'apaisent et me réjouissent. C'est dire leur importance!
09:16 Publié dans art, art de vivre, écriture | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : art, art de vivre, art africain, alain lecomte, galerie, rencontre, partage, humain
Commentaires
Quel bel hommage tu rends à l'art africain qui est si merveilleux et varié!
Écrit par : Mokhtar El Amraoui | 07/03/2013
C'est un art qui m'a tant donné, Mokhtar!
Écrit par : helenablue | 07/03/2013
Tu connais donc forcément ce film merveilleux, "les statues meurent aussi", qui m'a tellement marquée quand je l'ai découvert à 17 ans...En cet art, je suis à peu près ignare, mais certains objets m'interpellent néanmoins.
Écrit par : anne des ocreries | 07/03/2013
L'art souterrain par excellence. L'art tellurique aussi. C'est le pied qui frappe le sol. Bam. Bam. Bam. C'est une litanie sous un soleil de plomb dans les champs de coton. C'est le pied qui foule le sol. Bam. Bam. Bam. C'est d'une puissance inégalé selon moi. C'est un autre niveau de fréquence, très, très lent. L'énergie de la terre est la plus lente de toute. C'est de l'ordre de la décharge plutôt que de la retenu. Enfin. Celle qui fait plus de sens pour moi.
Écrit par : La Rouge | 07/03/2013
@ Anne:
Oui, je connais ce film! Tu sais l'art africain ne demande pas une connaissance, on peut y accéder bien entendu, c'est même fort instructif mais c'est un art brut et il parle aux tripes. La première fois que j'ai eu entre les mains un masque dan, par exemple, masque tout noir, très épuré et stylisé, j'ai été bouleversée. te dire pourquoi, je ne sais toujours pas, c'est comme si cet objet réveillait en moi quelque chose. certaines pièces d'ailleurs me dérangent tant elles sont fortement chargées, elles me mettent mal à l'aise et d'autres à l'inverse me font décoller. C'est vraiment un art particulier. Tout comme la rouge qui est noire quand elle peint, je le suis moi aussi. D'ailleurs une de mes meilleures amies, ma soeur de coeur est camerounaise et elle me dit toujours: " toi tu es blanche mais tu es noire en dedans!"
J'ai ce même sentiment d'évidence avec la musique africaine d'ailleurs et avec la danse!
:-)
Je souris parce que pour l'hiver prochain, c'est le Black Blue qui est tendance!
Écrit par : helenablue | 07/03/2013
@ La rouge:
Oui, je ressens ce dont tu parles aussi, l'art souterrain, tellurique, brut, profond. Connais-tu GUEM?
Écrit par : helenablue | 07/03/2013
http://www.youtube.com/watch?v=yaJympXSrAU
Écrit par : helenablue | 07/03/2013
Ma seule réserve, quelle vilaine habitude nous avons de faire commerce matériel et intellectuel de toute la purité de ces *oeuvres primitives qui sont toutes historiquement rattachées entre elles, qu'elles soient Inuit, Haïda, de toutes les peuplades encore vivantes ou disparues, exterminées sûrement. Achetées pour des pacotilles en guise de justification morale pour expier de nos vols méprisant passés, pour s'approprier biens, pans de culture de ces peuples et ainsi orner nos musées et places publiques. C'est typiquement occidental comme réflexe, aurait-t'on au moins la décence de prêter une oeuvre de ex: Rodin avant d'arracher de son socle un totem Haïda de 30 mètres pour le planter dans sa cour arrière, simplement parcequ'on a les pièces d'or pour le faire?
Quel est le partage réel entre votre culture, toutes ses ramifications, et les leurs?
Autre que l' argument, pour ces artisans et artistes, de la nécessité de subsistance
que nous nous empressons de combler... jusqu'à épuisement, bien sûr, des stocks. Dites-moi honnêtemnt le prix payé pour ce masque ou cette statuette et je vous dirai amicalement qui vous croyez être.
Mais tu retiendras également, et pardessus tout, que j'adore te taquiner...
*oeuvres primitives: du temps où l'esprit guidait les mains pour façonner les contours de la vie intérieure.
Écrit par : MakesmewonderHum! | 07/03/2013
@ MmwH!:
Oui, je sais que tu adores et ça me manquait!!
:-)
Ta remarque ne manque pas de bon sens! Je crois pourtant, mais peut-être suis-je un peu bête que l'intérêt qui a été porté et qui l'est encore à l'art africain, ou toute oeuvre primitive (si tu avais vu l'exposition quai Branly des peintures aborigènes, de toute beauté !) permet de mieux comprendre la culture et la manière de vivre de ces peuples... Il y a eu c'est certain des abus, des pillages et d'autres gestes assassins mais pas seulement, il y a eu aussi des amoureux de cet art et des aventuriers respectueux, mais bon, c'est vrai, quand je contemple le masque Dogon Kanaga que j'ai, je ne pense pas qu'il a été extirpé de force, ou comment il est arrivé jusqu'à moi ni combien il m'a couté, je dois bien te l'avouer!
Écrit par : helenablue | 07/03/2013
Je ne t'apprends rien en te disant qu'il y a une manière d'expiation pour les êtres immoraux comme mo,i à faire un peu la morale...
Parlant de vieilles désoeuvres primitives, tu voteras pour quel pape? Pour le blanc verdâtre à droite ou le joyeux et joufflu nègre affranchi à gauche du centre?
Écrit par : MakesmewonderHum! | 07/03/2013
Ha,ha,ha! Sacré Makes! Euh, me semble qu'il faut être cardinal, non, pour voter le pape? Je suis bien loin d'en avoir l'étoffe!!
Écrit par : helenablue | 07/03/2013
Bin ça nous changerais un peu, une Blue cardinale parmi tous ces pourpres.
Je t' ai déjà dis qu' enfant à la question tatati, tata ta, je répondais que je voulais être Pape, rien de moins!
T' imagines le fin renard directement dan'l poulailler avec comme baldaquin la Sixtine et son plafond. " Venez-za-moi-brigands-zé-brebis!"
Écrit par : MakesmewonderHum! | 07/03/2013
Lyes!
Écrit par : helenablue | 07/03/2013
toutes civilisations ont fait de l'objet le signe des pouvoirs,à chacun sa croix.
Bzzz...
Écrit par : le bourdon masqué | 08/03/2013
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