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14/04/2009

marcel

 

magritte.jpg

Marcel, il aurait un siécle aujourd'hui, c'était un drôle d'oiseau, plutôt de mauvaise augure et cependant... C'était mon grand-père, maternel, enfin peut-être, je veux dire peut-être mon grand-père! Paysans dans la famille depuis plusieurs générations, vrai c'est lui qui m'a appris à traire une vache, dépiauter un lapin, tendre des pièges aux rats musqués, tresser l'osier, cueillir des cerises, conduire un tracteur, coudre les feuilles de tabac, récolter les pommes de terre et, oups sentir les tomates! Je dis oups, parce que les tomates m'ont coûté cher... Il m'a appris aussi à jouer à la manille, au billard, bien manier la queue, à écouter le chant des pigeons et autres volatiles, il avait une grande volière... A fumer la pipe sous le saule pleureur, faire la course avec des cochons, ça j'aimais pas trop, chevaucher un porc ça fait peur, siffler, reconnaître un pissenlit d'un bouton d'or, et écosser les petits pois... Il m'a appris aussi et en même temps, que je n'étais rien qui vaille , m'a appris à bien me tenir sur la table de la cuisine pour pouvoir goûter à mon abricot frais, et m'a formé trés tôt, trop tôt à l'art de la sucette! Papy, l'ogre, et moi poucette bleue. Paix à son âme pour peu qu'il en eut une. Evidemment ! Tous, nous en avons une! La question est, qu'en fait-on ?

 

Commentaires

J'allais écrire que tu avais un papy cool mais houpssss ça finit par se gâter à la fin.

Écrit par : gaétan | 14/04/2009

Euh. Okay ouin.

J'sais pas comment le dire Héléna, mais je vais essayer de le dire.

C'est horrible. Parce qu'il ne s'agit pas de fiction. Le fond j'veux dire. Horrible.

Mais ton texte... Sa charpente, ses mots, son projectile, sa trajectoire... Ça remue les viscères. C'est sculptural, admirable. Grand et abject. C'est un crisse de texte que tu nous as mis là. Merci.

Écrit par : Gordon | 14/04/2009

Une peur bleue de l'ogre ...mais en fait le verre à moitié plein qu'il te tendait a sans doute construit une petite fille sensible et forte capable de transmettre à ses enfants une belle vision du monde Celle qu'un adulte irrespectueux a failli mettre à mal Cela s'appelle la résilience le pouvoir de transcender l'horreur et j'y crois beaucoup moi à ce mot...

Écrit par : laurence | 14/04/2009

Costaud, compact. Ce texte est une enclume.
Tendresse.

Écrit par : Claudio | 15/04/2009

Mon grand père à moi ( piemontais) avait une laiterie en plein quartier et j'ai donc grandi moi aussi au milieu des vaches (20 dans une étable) des lapins , des poules etc
mais s'il m'est arrivé souvent d'aider à nettoyer l'étable et à faire manger tout ce beau monde (cheval compris) , de servir le lait aux clients du quartier et à plumer la volaille le samedi pour la vente , j'ai toujours refusé d'apprendre à traire , à tuer les lapins...
quand je lis ton vécu je suis heureux que mon grand père se soit appelé Simon!
et pour ce qui est de savoir ce qu'on fait de notre âme, je pense que déjà de ne pas l'avoir vendu ...au Diable ça requier une "Grandeur" qui se retrouve dans tes commentaires .
allez, on continue y a du boulot qui nous attend !
amitié

Écrit par : alex | 15/04/2009

Ce texte est terrible, Helena, dans la cruauté de son réalisme mais il est aussi à l'image du monde : blanc et noir. Blanc par ce qui apparaît de prime abord comme une chouette relation entre grand père et petite fille : on se croirait presque dans un roman de Marcel Pagnol qui fleure bon la campagne et l'enfance dorée. Et la caméra recule ou plutôt s'approche derrière les murs où ce même grand père devient un monstre voleur d'innocence, comme si sa gentillesse devait être payée de retour ! C'est horrible la vie qui par les hommes abîment les enfants, les flétrit. Non Helena , quoi qu'il ait fait, lui, toi, tu n'es pas rien qui vaille, bien au contraire. C'est cette souffrance, cette ambivalence dépassées je l'espère qui ont fait de toi cet être exceptionnel avec qui nous communiquons chaque jour, un être qui porte sur les choses un regard tellement lucide. Dans chaque situation négative, on finit par construire quelque chose de positif. Merci pour ton immense confiance de nous faire partagées ces pensées si intimes.

Écrit par : Saravati | 15/04/2009

@ gaétan : Jekyll et Hyde ! Les deux en un !

Écrit par : helenablue | 16/04/2009

@ Gordon : Merci Sandy , d'avoir mis des mots . ce que tu dis sur mon texte,là, ça me touche vraiment.
Kiss
Blue

Écrit par : helenablue | 16/04/2009

@ laurence : Oui , la résilience, la fleur qui pousse sur le fumier ; ça existe, on peut arriver à faire quelque chose même du pire. Ce n'est pas facile, sans doute , comme tu le dis, de la bonne graine au milieu de l'ivraie, oui.
Mon grand-père était haut en couleur si je puis dire, il aimait beaucoup raconter des histoires, le tout dans un patois chti indéfinissable...
Je crois que depuis toute petite j'ai développé cette capacité du verre à moitié plein , en grande partie grâce à ma capacité à imaginer, à rêver.
Ma " résilience " s'est faite comme ça , et ça continue.
Une manière de transcender, de sublimer, de créer.

Écrit par : helenablue | 16/04/2009

@ claudio : Toute mon amitié.

Écrit par : helenablue | 16/04/2009

@ Alex : A dire vrai , je n'avais pas trop le choix de dépiauter ou non, de saigner le cochon, ou de traire les vaches , baratter le beurre et gober des oeufs !
Il voulait m'apprendre la vie, comme il disait souvent !
Il me l'a apprise , du bon et du pire.
Je n'ai pas vendu mon âme au diable , c'est vrai , mais il m'arrive de déjeuner avec lui !! :+)
Amitiés Alex .
Hélèna

Écrit par : helenablue | 16/04/2009

@ Saravati : C'est vrai tout cela m'a faîte , m'a construite , fait partie de moi .
j'ai eu pendant un certain temps la période de rejet, puis maintenant que la violence s'atténue , je peux appréhender tout cela avec plus de sérénité et je me permet de le vivre, c'est sans doute pour cela que je peux le partager et en parler ici avec vous.
je pense que l'on peut , oui faire du meilleur avec du pire, mais cela demande un certain travail et aussi certaines rencontres. Je parle aussi de tout ça pour témoigner en quelque sorte bien modestement, et permettre peut-être à d'autres de voir que c'est possible, et avoir ainsi de l'espoir.
Pendant toutes ces années où la mémoire m'est revenue, si je puis dire, plus juste de dire , les années où j'ai pu avoir accès à ma mémoire qui avait été si bien verrouillée par le système familial et par la réaction naturel du cerveau face à des chocs émotionnels de cette ampleur , les témoignages d'autres personnes m'ont beaucoup aidé.
Etre à soi-même .
En conscience.
C'est important.


A bientôt, et merci de ta fidélité.
Hélèna

Écrit par : helenablue | 16/04/2009

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