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14/06/2011

Une extraordinaire journée ordinaire (matin)

Je me lève sous les coups de six heures du matin si bien sûr la veille je ne me suis pas couchée trop tard accaparée par un enième film policier qui fait ma joie, avalée toute crue par un roman ou complètement absorbée dans une discussion outre-atlantique qui avive mes neurones, exacerbe mon excitation littéraire et touche mon coeur avide de mots tendres. Souvent complètement défaîte, les cheveux en bataille, un peu collés par l'application la veille d'une crème à l'amande douce pour nourrir des pointes trop sèches et malmenées par des brushings répétés que j'ai depuis quelques temps d'ailleurs stoppés nets suivant les bons conseils de ma coiffeuse préférée, Carole, qui en plus d'être particulièrement douée dans son domaine est une femme délicieuse, généreuse et prolixe. Je l'apprécie beaucoup. Chez le coiffeur je n'aime pas parler, avec elle, c'est simple, suffit de l'écouter. Moulée dans son cuir slim délavé, hissée sur des compensés vertigineux stylés, toujours une ou deux bagues têtes de mort au doigts finis d'un vernis craquelé aux couleurs indéfinissables, le regard pétillant et la bouche framboise écrasée assortie à quelques mèches éparses de même tonalité dans une chevelure brune coupée à la garçonne, elle me raconte sa vie, les problèmes récurents qu'elle a avec son fils adolescent et les déboires créatifs de sa fille. Elle me parle aussi fréquemment de ses peines de coeur qui la tourmentent n'ayant comme elle le dit plus vingt ans et ne supportant pas l'idée de vivre seule, craignant par dessus-tout de vieillir esseulée, oubliée et perdue. C'est vraiment quelque chose qui la perturbe au plus haut point. Au début je tentais vainement de la persuader que cela ne pouvait pas arriver, par gentillesse, par courtoisie; finalement j'ai compris que c'était peine perdue et qu'il valait mieux que je la laisse se plaindre sans tenter de la dissuader, j'ai comme le sentiment qu'elle se nourrit vraiment de cette crainte et que c'est ce qui lui donne le ressort d'encore être sur le pont comme elle le fait, inlassable et intarissable.
 
Dans mon vieux peignoir taupe ou dans le déshabillé de soie bronze acheté sur la cinquième avenue, je tente de trouver doucement mes marques et tout en me vidant la vessie, encore dans les limbes, je me remémore les rêves que je viens de faire. C'est devenu un réflexe avec le temps, ça se fait automatiquement. Je passe voir vite fait si je n'ai pas un mail ou deux et qu'elle a été l'agitation nocturne sur mon Helenablue. Si rien ne s'est passé d'un côté comme de l'autre, je suis un peu déçue mais s'il y a matière, je réponds illico ou alors je laisse mûrir le sourire aux lèvres. J'enfile un demi-litre d'eau minérale que j'ai toujours à portée de main près de mon bureau et retourne me coucher. C'est alors le moment que je préfère dans mon début de matinée, celui où à moitié entre éveil et sommeil, je laisse mon esprit divaguer, un moment privilégié et d'extrême importance pour moi, si par malheur je ne peux m'offrir cette parenthèse je suis toute la journée d'humeur de cochon noir et c'est pas beau à voir!
 
Au deuxième réveil, les choses se compliquent parce que je suis à la bourre étant donné que je tire au maximum du possible les minutes, me disant en regardant le réveil une fois vers 9 heures," bon j'ai encore le temps", puis vingt cinq minutes après," allez encore cinq minutes", évidemment dix heures arrivent comme pour rire et là branle bas de combat, c'est la course. Comment être dans son lit en nuisette à dix heures et en habit de lumière à 10h30 à l'autre bout de la ville pour ouvrir dans les temps la boutique qui m'attend! Évidemment c'est impossible, mais toujours je le tente. Me lève d'un bon, cours à la cuisine, bois un grand bol de thé vert ou d'Earl Grey suivant la saison, grignote un tartine de pain complet, remonte à la salle de bains, me débarbouille la face avec une mousse nettoyante à tout faire, yeux y compris, plus que nécessaire car parfois la veille dans une sorte de flegme incommensurable j'oublie de me démaquiller et le lendemain c'est un véritable désastre même si je n'abuse pas de fond de teint ni de cache-misère en quantité excessive.
 
Je me pose, il n'y a pas le feu au lac, je reprends mon souffle. Et je fais quelques extensions musculaires comme une chatte quand elle s'offre au soleil, je m'étire de tout mon long et énergiquement je m'attaque à ma tignasse, je brosse dur la tête en bas, et de nouveau massivement la tête haute. Je passe à l'étape suivante, depuis que Stella est passée par là avec ses conseils de maquillage ayant obtenu de moi une promesse de tous les jours le faire quand je vais travailler, je m'applique et suit ses directives en bonne élève que j'ai toujours été. Je peigne délicatement mes sourcils avant de les assombrir et les redessiner légèrement d'un trait de crayon ton sur ton, c'est pas grand chose mais d'un coup le regard s'agrandit. Avec un pinceau plat à poils courts et doux, je dépose un fard à paupières terracota et je lisse du doigt pour faire la banane, juste en dessous de l'arcade sourcilière, ça ouvre encore un peu plus le fameux regard et pour couronner le tout je passe la mascara ébène qui donne définitivement à l'ensemble une présence étonnante.
 
Avant de m'être occupée des yeux, je me suis faite comme dirait mon amie stellaire une belle peau! Je m'enduis la face d'une crème hydratante aux parfums subtils et délassants et puis je fais fondre au creux de la paume une base de teint en correspondance totale avec la teinte beige de ma peau de blonde et je m'applique à étaler de façon uniforme sur toute la surface du visage ce qui me donne d'un coup une mine renouvelée et un éclat encourageant un début de journée. Un coup de poudre légère comme l'air pour les dernières petites imperfections qui traînent et deux coups de pinceaux rose judicieux sur le haut des pommettes, j'ai spontanément l'air d'une jeune fille en fleur. J'estompe vite du bout des doigts, le mot d'ordre étant " faut pas que ça se voit!". Je termine par la bouche, là je me délecte, c'est vraiment le geste que je préfère, sensuel. J'ourle avec le bâton crémeux la lèvre supérieure et puis je termine celle du bas finissant de poser le brun rosé tendre. Un dernier coup d'oeil dans le miroir, hop, hop, le déodorant anti-transpir absolu sous les aisselles, je cours à la chambre car là je suis limite dans l'horaire et je m'habille à la hâte avec ce qui me tombe sous la main.
 
Dans les bons jours, c'est réussi, je mets naturellement ce à quoi je désire ressembler, d'autre matins c'est la vraie galère, d'un coup je me trouve bien dans rien, nulle, moche, pas présentable et je peste et je rage, aujourdhui, joker! C'est une bonne matinée! Ouf! Des dessous assortis, noirs, un pantalon sarouel, noir, un joli top déstructuré au décolleté suggérant, noir et mes sandales fétiches du moment, drapées à boucle d'un doré passé, noires. Mes bracelets habituels et ma grosse bagouze sans laquelle je me sens nue, il ne me reste plus qu'a courir. J'attrape mon blouson de cuir, noir lui aussi et je stoppe net. J'ai oublié quelque chose quelque part dans ce rituel! Diable qu'est-ce que cela peut-il être? Je perds de précieuses secondes à y réfléchir et puis " euréka! " ça me revient! je ne me suis pas parfumée, ça, c'est rédibitoire! Hop, je m'asperge d'un geste ample toute entière de la tête au pied de cette fragrance fétiche et là je suis fin prête à aborder la journée.
 
Je saute dans ma voiture aussi noire que tout le reste, je sais, je sais, ça fait beaucoup de noir, black is black, pas sombre, pas obscur, pas triste comme peuvent l'être les idées, ni hostile comme certains regards, rien de mélancolique, ni occulte, ni d'un autre continent, juste noir de chez noir, une sorte d'élégance abstractive à la Soulages et je me mets en route la musique à fond, la fenêtre ouverte, les cheveux au vent. Comme à mon habitude j'arrive à la boutique complétement décoiffée, parraît que ça fait mon charme... et une fois garée, j'ouvre en retard d'un bon quart d'heure ma grille, je désamorçe l'alarme, j'allume les feux de la rampe, j'installe la liste de lecture musicale qui sied à mon humeur du moment. J'en ai plusieurs. Musique brésilienne, musique et vocals jazz, musique classique, musiques du monde et celle que je préfère, la liste Blue que m'a concoctée mon homme avec un mélange choisi des chansons, morceaux, solos que je préfère. Un régal. J'allume l'ordinateur, je passe l'aspirateur, arrange un peu les choses et ma chevelure et je prends possession de ce lieu que je connais plus que par coeur ainsi que du rôle que je vais jouer maintenant pour les huit heures à venir...
 
 

Commentaires

Mais quelle vie de chien !
Je vois mes voisines de boutiques toutes arriver en retard...Dix heures et quart, voire la demie bien passée et tassée... La Galerie est toujours ouverte à 9 h 30 !
...Mais c' est pas moi qui la tient !!!
Je comprends ma chance...mais bon, il y a du boulot, ( fête des pères oblige ), mettons vers 16 heures , je vais aller y faire un tour.

Écrit par : versus | 14/06/2011

Oh! Une vie de chien tu trouves?
Pas moi, c'est pas le goulag quand même, et puis je suis chez moi d'un côté comme de l'autre alors à part parfois une culpabilité en sourdine liée à ce que j'ai avalé une horloge petite, de force, ça va!

Écrit par : helenablue | 14/06/2011

Dear Blue,
Très belles narration et description des gestes quotidiens de ta vie qui en deviennent des moments très importants dotés d'une poésie certaine . Quel don dans cette description si détaillée et ne manquant ni d'humour ni d'auto-dérision. Une belle page de roman.

Écrit par : Mokhtar EL Amraoui | 14/06/2011

La suite arrive Mokhtar...

Écrit par : helenablue | 14/06/2011

Je ne pense pas du tout au chien mais à la chatte au soleil avec sa tignasse, son rouge et son parfum. Je suis en vacances ! Je peux enfin prendre le temps de lire quelques billets le matin et je commence par toi. C'est absolument délicieux, on en lirait des pages.

Écrit par : Doodle | 14/06/2011

Bonne vacances ma belle! Tu lézardes?

Écrit par : helenablue | 14/06/2011

Mais non, c' était ironique, ce chien qui n' a pas l' air trop en laisse !
Bon, j' y vais sérieusement cette fois ci !

Écrit par : versus | 14/06/2011

Ah oui? Lyes... Pas de temps à perdre Versus, voilà que je vais vous mettre en retard à votre tour! Serait-ce contagieux?

Écrit par : helenablue | 14/06/2011

Pas encore assez à mon goût mais dans quelques jours, je n'y manquerai pas. Il me reste quand même un mois ! Voyage ? Balconville à fleurs ? Je n'en sais rien pour l'instant. Moi, les choix multiples, ça m'arrête net ;-)

Écrit par : Doodle | 15/06/2011

Un mois! Pourquoi tu pousses pas jusqu'ici?
Fuck, ça te rajoute encore un choix supplémentaire! :-)

Écrit par : helenablue | 15/06/2011

Merci du fond du coeur Blue.
En effet !

Écrit par : Doodle | 16/06/2011

T'inquiète Blue, hein, j'ai compris.
Ça vient de me frapper, pour le sens.

Écrit par : Doodle | 17/06/2011

:-)

You're welcome, you know!

Écrit par : helenablue | 17/06/2011

:-)

Écrit par : Doodle | 17/06/2011

Boudiou ! bin moi, j'ouvre les yeux, je gire dans mes fringues en 10 secondes, je vais pisser et je file ouvrir aux poules ; un tour de jardin....APRES, je peux grailler et penser à me récurer la couenne. OU.....je m'affale devant l'ordi, et je dois avoir un siège maléficé.....quand il me tient, il me lâche plus ! :))))

Sacrés rituels matinaux ! :)

Écrit par : anne des ocreries | 21/06/2011

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