Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

26/11/2012

Jacques Loussier Play Bach Trio

 

 

Je me réveille en vrac, déchirée de l'intérieur, encore à lutter avec mes vieux démons qui m'empêchent de vivre mes désirs les plus profonds. Toujours ce mur, toujours cette chappe, ce noeud qui me vient de si loin et que je tente de résorber avec le temps. Pourtant j'ai peur, le temps passe, vais-je arriver à temps à me vivre complètement corps et âme? Avant la ménopause, avant que je m'assèche de vieillesse et que je me rabougrisse de la chair, avant que ça ne puisse plus, vraiment plus. Je sens les blocages, je sens que ça serre, je sens que je n'y arrive pas, comme si j'étais enfermée dans un écran de télé et que je cogne à l'écran de toute mes forces pour sortir de la boîte, comme cette publicité pour protéger les enfants des programmes qui ne sont pas pour eux, des images qui pourraient les choquer. Moi c'est mon passé qui me hante, comme Angot, comme tant d'autres et je veux m'en tirer, je veux récupérer ce qui m'a été volé, arraché, pris de force. J'écoute Loussier jouer Bach, Colette disait de Jean-Sébastien qu'il était comme une machine à coudre. je l'entends comme une machine à en découdre. La musique a cet effet étonnant et tout à fait extraordinnaire d'arriver à me faire oublier mon enveloppe charnelle, elle me parle au-delà et je me sens libre avec elle comme je peux l'être avec la poésie d'Eluard ou l'air frais d'un petit matin au bord de l'océan, le plombé d'une nuit chaude d'été, un feu de camp. Je sais pourtant que ça n'est pas à force d'y penser, d'y repenser encore, de me culpabiliser de ne pas y arriver et de forcer la chose qu'alors se libèrera l'énergie de vie en moi. Et quand je butte comme j'ai l'impression de faire depuis trois heures du matin, c'est au cutter que j'attaque ma vie. Quelle merde que d'avoir envie de vivre à fond, dense, quelle prétention peut-être que toujours vouloir plus, que toujours vouloir fort. Maman me disait qu'être riche c'est se contenter de ce que l'on a. Se contenter, je ne peux pas, je ne peux me résoudre à m'accrocher au peu que j'ai réussi à regagner. Ce que je veux c'est sentir la chaleur du bonheur m'envahir et n'être qu'être. Les notes de Bach s'insinuent en moi, je sens que la contrebasse me charme et que doucement mes tensions intérieures et mes sensations de lutte acharnées baissent, je m'apaise, me cotérise. Phénix. Quand le piano revient avec toute sa vitalité, je récupère la mienne. Loussier me permet de rebondir. Tant qu'il y a de la vie, on peut espérer, on doit le faire. Rien n'est figé. Nous ne sommes que mouvements. Il faut que je trouve comment je vais pouvoir contourner cet obstacle. Je sais que la clef existe quelque part. C'est gai d'entendre un public comme ça avoir du plaisir et communier ainsi autour de la musique. Je ne regrette pas mon choix, j'ai pourtant hésité, je voulais écouter Mahler, la cinquième symphonie, le "end" de Mort à Venise. J'ai commencé et tout de suite j'ai saigné, je me suis dit " tu n'es pas maso, quand même, tu ne souffres donc pas assez que tu veuilles en remettre une louche!". C'est idiot parfois de se mettre au diapason musical de son état d'âme, c'est pas le bon plan. J'ai pensé à Loussier. Hier matin au petit déjeuner pendant que nous parlions de choses et d'autres avec mon homme il est appparu au milieu de la conversation et nous nous sommes l'un et l'autre tus et juste regardés. Intense. Cette intensité, je la retrouve. J'ai de la chance d'être aimée comme je le suis depuis tant d'années. J'ai de la chance d'aimer. Au nom de cet amour je veux être entière. Je veux être toute à moi pour être toute à lui. Cet homme magnifique qui partage ma vie. Je cesse d'écrire, je me laisse porter par les notes, et j'entre fière dans ma journée. Presque recomposée.

 

Commentaires

Bin, ta mère t'aura au moins donné une clef. En effet, c'est être riche que de se contenter de ce qu'on a.....comme principe de base.
Disons que c'est à partir de notre inventaire qu'on peut bâtir. ça ne veut pas forcément dire qu'il ne faille pas chercher "plus", ou "mieux".....ça, ça vient peu à peu quand justement on bâtit avec ce qu'on a au départ, ça vient insidieusement ; ça veut juste dire qu'il n'est pas besoin de se rendre malade avec ce qui nous manque, parce que c'est là que le bât blesse. Savoir tirer parti de nos avoir, sans se rendre malade après le reste, est le meilleur moyen de le faire advenir dans notre escarcelle, comme un projet bâti depuis longtemps restant le cap en vue, "point A, atteint, point B, en route !". C'est cette angoisse du temps qui pourrait nous manquer, c'est cette frustration qui nous "fout dedans" à chaque fois, en fait, alors que marcher son chemin aussi serein que possible permet meilleure récolte...

Elle t'avait donné une clef, mais pas le sens dans lequel la tourner, pas dans quelle serrure il fallait l'introduire ! Mais elle t'avait donné une clef, elle aura fait cela pour toi, confusément, même si pour elle ces mots avaient une autre finalité.

Écrit par : anne des ocreries | 26/11/2012

Oui, Anne, bien sûr que c'est être riche que d'apprécier ce qu'on a et ce qu'on a déjà parcouru, créé, partagé, élaboré. Mais j'avoue que c'est s'en contenter qui ne me plaît pas. Maman nous a élevé mon frère, ma soeur et moi dans l'idée du sacrifice. mes parents pensaient qu'on naissait mauvais et qu'on avait une vie pour expier et qu'il fallait donc ne pas avoir trop de demandes, trop de désirs, trop de désirs surtout. Je n'ai jamais pu accepter cette idée. C'est le désir qui me fait avancer, l'envie d'apprendre, d'explorer, de progresser. Mais comment dire, là, ce qui m'encombre c'est que je ressens que je pourrais mais je ne me le permets pas, un verrou bien saucissonné dans ma tête m'en empêche et malheureusement influe sur ma manière de vivre mon corps et de pouvoir en faire ce que j'ai envie d'en faire. Un peu comme une sorte de paralysie.
Souvent je reviens en arrière et regarde en miroir ma vie, et ne peux que me réjouir de chemin déjà fait. Ma vie amoureuse, mes enfants, mon entreprise, la récupération de mon identité, de ma mémoire, de mon histoire, mes amitiés, mon blog ici aussi... Mais je n'arrive pas à me contenter de cet acquis, de ces avoirs, parce que je voudrais être, en être et en avoir été davantage. C'est frustrant, c'est certain, pourtant je ne suis pas aigrie et n'ai pas de rancune. j'ai eu à vivre ce que j'ai vécu, et j'essaie d'en faire la plus belle expérience possible. C'est ce qui me fait souffrir au fond, c'est cette incapacité à complètement pouvoir investir le corps et l'esprit qui m'ont été donné le jour de ma naissance parce que trop vite abîmés, détournées de leur trajet naturel comme on détourne un fleuve et qu'ainsi on assèche toute une plaine.
Je ne me plains pas, je ne me plains plus depuis longtemps, depuis que j'ai compris que ce n'est pas en restant victime que je vais m'en sortir. Je cherche juste à trouver le moyen de gagner encore et encore du terrain, que repousse l'herbe, que refleurisse mon jardin.
Je suis tout autant sereine qu'en colère, confiante qu'apeurée, présente qu'absente. je voudrais que bascule une bonne fois pour toute la balance et ne plus être toujours ainsi ramenée à ce non-résolu, ça me donne la gnaque souvent et ça me décourage aussi.
Alors je mets peut-être la barre un peu haut, c'est mon côté jusqu'au-boutiste. J'ai le sentiment que je ne pourrais être en paix que lorsque j'aurais cette relation fluide avec moi-même et que je ne serais plus encombrée par des réactions indépendantes de ma volonté, quand je ne serais plus agie. J'aurais alors aucune peine à me contenter de ce que je suis!

Écrit par : helenablue | 26/11/2012

Justement ; c'est ce que j'essaie de te dire ! le verrou sautera quand tu cesseras de le ronger ! je n'ai que cette métaphore à trois sous en poche à cette heure-ci, mais l'idée y est !

Écrit par : anne des ocreries | 26/11/2012

Ils ont eu Bill Evans, vous, Jacque Loussier, ma foi vous n'avez pas perdu au change.

Le plus dur des combats, celui de toute une vie, c'est celui contre/pour soi-même. Sommes plus que nombreux à sous-estimer l'ampleur de la tâche. Suis toujours étonné de voir des gens lourdement handicapés qui y arrivent malgré tout. Faut reconnaître également que certaines blessures qui nous appartiennent et qui semblent à première vue moins apparentes nous demanderons de continuellement puiser à l'intérieur de soi pour corriger une démarche "claudicante", du moins pas aussi "fluide" qu'on voudrait.

Écrit par : MakesmewonderHum! | 26/11/2012

he bé! dis donc, je savais pas que tu pouvais être violente ...Un cutter pour attaquer la vie! rien que ça :) pourtant à lire ton commentaire ,je trouve que tu t'en sorts mieux que bien; ça cicatrise bien (je dis ça à repensant à tes papiers d'il y a deux trois ans quand je t'ai découverte par hasard avec ton blog ça me semblait mal parti.... là on sent de la fluidité dans le haut du corps comme dirait je ne sais plus qui , de la souplesse dans l'interieur. Voilà le diagnostic s'arrête la pour ce matin ; C'est vrai que la musique classique calme les nerfs.

Écrit par : alex | 27/11/2012

@Hélènablue
"Nous ne sommes que mouvements"
Comme c'est bien dit. Tu seras toujours en sève de nouveaux rêves parce qu'en perpétuelle quête, donc jamais asséchée.

Écrit par : Mokhtar El Amraoui | 27/11/2012

@ anne:

Oui! Le fameux lâcher-prise...

Écrit par : helenablue | 27/11/2012

@ MmwH!:

Hum, j'ai quand même un faible plus prononcé pour Bil Evans!!

Je suis complètement en accord avec toi sur cette notion de combat pou/contre soi-même! Et je trouve d'ailleurs que plue le temps avance plus on devient humble même si on reste décidé! C'est vrai qu'il est de plus lourd cheminement que d'autres, il me semble pourtant que s'ouvrir à ses émotions, les accepter, et être plus présent à sa vie en conscience est une voie assez universelle. Je ne désespère pas atteindre cette fluidité en tout cas dans l'échange entre mon inconscient et moi...

Écrit par : helenablue | 27/11/2012

@ Alex:

Oui, tu as raison Alex, toi qui me suis depuis longtemps. Je suis plus souple de l'intérieur et plus confiante aussi, ça n'était pas gagné!
:-)

Écrit par : helenablue | 27/11/2012

@ Mokhtar:

Cette quête perpétuelle m'aide et m'énergise. Chaque geste qu'on fait, chacune de nos pensées, chacune de nos relations et tout ce qui nous arrive dans une journée nous transforme infénitésimalement. Et chaque jour l'un après l'autre nous amène à être autrement, d'où l'importance de faire des bons choix, comme celui d'écouter son coeur... mais pas toujours il est bon aussi de raison garder!
C'est cet équilibre entre passion et raison, dont parle Bizak dans son dernier post qui est délicat à appréhender. Seul le temps peut donner la température du bon choix, le temps, tous ces jours qui se suivent les uns après les autres et qui permet de mesurer la fidélité, l'amitié, et l'endurance... On est mouvements mais pas seulement, on est aussi matière.

Écrit par : helenablue | 27/11/2012

J'ai toujours dit que Bach jouait du jazz avec sa musique syncopée et la Bass und continuo du clavecin équivalent de la batterie de nos jours. Très belle vidéo. Miam, j'en mangerai.

Écrit par : Dr Sangsue | 30/11/2012

Les commentaires sont fermés.