02/11/2010
mémoire
Le temps est un acide
Qui mord dans la matière
Et le temps est un fluide
D'essence meurtrière
L'esprit est un bureau
Où d'infinis tiroirs
Préservent la mémoire
Du coeur et de la peau...
- Christian Mistral - extrait " Comme les bulles " - Fontes -
22:19 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : art, peinture, dali, poésie, christian mistral, mémoire, recherche, rencontre, vivance, humain
Commentaires
C'est une belle association, un léger goût d'amertume..
Mais notre esprit est vivace qui nous garde jeune et nous fait avancer... :)
Écrit par : Flo H | 02/11/2010
j'aime beaucoup, surtout la deuxième strophe.
Écrit par : anne des ocreries | 03/11/2010
M'en souvenais plus...
Ça me vient de ma mère, qui m'expliquait ainsi, enfant, la nature de la mémoire. «Ce sont de petits tiroirs. Plein ta tête. Chaque chose que tu apprends, tu la places dedans. Une chose, un tiroir. Ta tête est un bureau, immense, plein, plein de tiroirs, tu ne manqueras jamais d'espace, il y a plein de place. Ce que tu sais, ce que tu sens, ce dont tu veux te souvenir, tu le loges, là, chacun dans son tiroir, afin de le récupérer facilement quand tu en auras besoin.»
Ce n'est pas ainsi que le rappel fonctionne, à mon avis d'adulte: ce serait plus un mélange d'hyperliens et de poupées gigognes. N'empêche, maman avait le tour de frapper mon imagination, et force m'est de constater que je me souviens...
Écrit par : Christian Mistral | 03/11/2010
Ces deux strophes représentent et condensent, en elle, cette lutte acharnée entre Chronos et notre mémoire Mnémesis.
Si la première rappelle franchement l'implacable vérité de la corrosion du temps qui nous ronge et dévore, la seconde,elle, constitue, néanmoins, la victoire de l'esprit et son immortalité grâce à cette infinité de tiroirs où il protège notre mémoire, notre être-là dans l'univers!
Quelle âpre lutte très bien rendue par tant de finesse mistralienne!
Chapeau, Hélènablue, pour ton judicieux choix de l'oeuvre du grand Salvador Dali!
Écrit par : Mokhtar EL Amraoui | 03/11/2010
Les tiroirs dans la tête c'est une vielle histoire...on la disait de Napoléon Ier...Excellente illustration avec Dali .La première strophe me parait plus originale...
Écrit par : Manouche | 03/11/2010
@ Flo :
Oui, notre esprit est toujours en mouvement, vivace et vivant!
Je crois qu'on sous estime souvent même sa capacité au changement et à l'ouverture, souvent par peur de l'inconnu, pourtant pour en avoir fait l'expérience, je sais que rien n'est figé et qu'on est toujours en devenir..
Écrit par : helenablue | 03/11/2010
@ anne:
Elle me fait penser à ce poème de Baudelaire que j'aime tant également:
LXXVI — Spleen
J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans.
Un gros meuble à tiroirs encombré de bilans,
De vers, de billets doux, de procès, de romances,
Avec de lourds cheveux roulés dans des quittances,
Cache moins de secrets que mon triste cerveau.
C'est une pyramide, un immense caveau,
Qui contient plus de morts que la fosse commune.
— Je suis un cimetière abhorré de la lune,
Où comme des remords se traînent de longs vers
Qui s'acharnent toujours sur mes morts les plus chers.
Je suis un vieux boudoir plein de roses fanées,
Où gît tout un fouillis de modes surannées,
Où les pastels plaintifs et les pâles Boucher,
Seuls, respirent l'odeur d'un flacon débouché.
Rien n'égale en longueur les boiteuses journées,
Quand sous les lourds flocons des neigeuses années
L'ennui, fruit de la morne incuriosité,
Prend les proportions de l'immortalité.
— Désormais tu n'es plus, ô matière vivante !
Qu'un granit entouré d'une vague épouvante,
Assoupi dans le fond d'un Sahara brumeux ;
Un vieux sphinx ignoré du monde insoucieux,
Oublié sur la carte, et dont l'humeur farouche
Ne chante qu'aux rayons du soleil qui se couche.
Écrit par : helenablue | 03/11/2010
@ Christian Mistral:
Ta maman avait raison pour les choses qu'on apprend, qu'on sent, celles dont on veut se souvenir on pourrait en dire autant pour celles qu'on ressent, celles qu'on imagine, celles auxquelles on aspire, celles qu'on aime, celles qu'on rencontre, celles qu'on ne veut pas voir, celles qui nous déchirent plein de place en effet dans notre petit cerveau d'enfant, d'adulte, d'humain, c'est même exponentiel. Un tiroir fait la place à un autre qui lui-même ouvre le terrain à un troisième voire davantage, c'est sans fin.
Je te rejoins quant à la manière où tout cela se met en place dans notre tête et le comment y puiser aujourd'hui ce qui nous est précieux et nécessaire, les tiroirs s'entrechoquent, s'entremêlent, s'entrecroisent, s'imbriquent les uns dans les autres, il y en a même que j'appelle " barbe bleue" la clef tachée de sang... mais c'est une autre histoire.
J'ai toujours beaucoup aimé ces quelques vers de toi, ceux-là et beaucoup d'autres encore...
Bon anniversaire Black Angel.
Love,
Blue
Écrit par : helenablue | 03/11/2010
@ Mokhtar:
Merci cher poète, j'aime beaucoup cette oeuvre de Dali, visionnaire!
Et c'est vrai qu'associée aux vers de Mistral, je trouvais le cocktail, disons, interpellant!
Écrit par : helenablue | 03/11/2010
@ Manouche:
Ah!?! je l'ignorais.
Écrit par : helenablue | 03/11/2010
Maman a des lettres, héhé...
Écrit par : Christian Mistral | 03/11/2010
Oui l'image est belle et parfois en vieillissant cette "commode à tiroirs" se renverse de façon encore inexpliquée, dans un terrible fracas tout en ralentie. Tous les tiroirs remplis de leurs souvenirs se vident à jamais.
Le pauvre de beau-père, hier, a encore chuté pour la inième fois, en pleine "face" au dire de l'infirmière. Le visage tuméfié il exprime sa douleur mais n'a plus la mémoire et les mots pour localiser l'endroit d'où provient cette douleur.
Prenons grands soins des p'tites choses qu'on y place, ajoutons aux plus douloureuses quelques feuilles au coloris automnal et le souvenir de leurs éclats de rire, la "commode" sera mieux équilibrée pour rouler sur le long plancher d'la vie.
Écrit par : MakesmewonderHum! | 03/11/2010
Magnifique poème, qui me fait plein de vibrations d'émotion... Il me "parle".... et je trouve interessant le parallèle que tu fais par la suite avec Baudelaire et son Spleen... Cela fait un moment que je ne me suis pas replongée dans ses oeuvres....
Mais les tiroirs, il faut de temps à autre les vider, comme pour enlever la poussière, celle "qui pousse hier" vers aujourd'hui....
kissous
Amélie
Écrit par : amelie | 04/11/2010
L'inextricable tempête souvent sous un crâne...
Happy birthday Christian !
Bize Blue...
Écrit par : laure K. | 04/11/2010
Très beau blog, plein de belles choses, artistique et intéressant, on s'y plonge comme dans un beau songe...
Je repasserais.
Écrit par : Redsmile | 09/03/2011
Au plaisir!
Écrit par : helenablue | 09/03/2011
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