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18/12/2010

"Les corpuscules de Krause" de Sandra Gordon

Etonnant de lire le livre d'une auteure devenue une amie au fil d'échange de blog à blog, de mails à mails et finalement de chair quand elle m'a remis son ouvrage en mains propres manifestement aussi émue que moi un soir au Moonshine, le soir de la veille de cette si étonnante soirée où toute la tribu mistralienne et d'autres s'étaient réunis pour le lancement des fameux "Corpuscules de Krause". Je me souviens avoir lu la dédicace avec une larme à l'oeil et puis la préface tôt dans la matinée du lendemain dans le fauteuil trop mou moelleux dans lequel on s'enfonce qui trône face au bureau de Christian Mistral au Bunker, il y avait une lumière dehors particulièrement magnifique et il était prévu une grande ballade en fin de matinée vers le Mont Royal. J'ai souri à la lire, j'ai tout de suite reconnu le style et l'écriture franche, truculente et directe que je lui avais toujours connue et dont j'apprécie la nature. Je n'ai jamais vu autant d'écureuils de ma vie après cette lecture, c'est ça aussi la force de la littérature, elle ouvre le regard et aiguise les sens. Et même si ça n'est pas peut-être dans l'ordre des choses qu'on lise en public la préface d'un roman qui vient juste de sortir, j'ai eu déjà là-bas vraiment envie de le faire, bon, je demande indulgence parce qu'il faut quand même dire que le québécois pour des néophytes comme moi n'est pas franchement facile à appréhender avec l'accent et qu'il m'aurait sans doute fallu quelques cours de sacres pour rendre avec justesse le ton dans le cru de la langue. La musique de Michel Plamondon, notre ami le Plumitif donne un ton d'ailleurs à cette lecture un peu plus angoissant peut-être que ce que Sandra voulait rendre, elle se sert plutôt de l'humour décapant voire noir et de causticité rude matinée de tendresse pour faire dire à ses personnages et notamment à sa Lucie ce qu'elle veut nous transmettre, mais moi à la lecture du livre en entier faite finalement depuis peu, j'avais volontairement voulu attendre pour pouvoir avoir un recul affectif mais ça ne marche pas si bien, j'ai eu vraiment tout au long du bouquin l'impression bien nette d'être avec Sandra Gordon en personne près de moi, j'ai trouvé qu'il y avait en filigrane cette dimension terrible et ce ton tendu, en voici la mouture, mixée par mon cher Barner.

 

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écureuil 2.jpg

 

podcast
 

- Prologue des Corpuscules de Krause de Sandra Gordon- Musique Michel Plamondon - Mixage Barner- Voix Blue -

 

 

 

corpusculedekrauselemeac2010.jpg

 

Au cours de ses quarante sept chapitres, Sandra Gordon nous maintient en alerte, on sent toute la quête de réponses des uns et des autres, chacun à leur manière et tous confrontés à leurs solitudes respectives et à leurs angoisses. Une galerie de personnages qui s'entrecroisent, s'entremêlent, s'entraident aussi au coeur de nulle part qui pourrait être n'importe où. Le langage est cru, parfois cruel même et pourtant en même temps une grande humanité se dégage du livre, une intensité particulière qui nous ramène au sens même de la vie. L'usage du joual accentue pour moi cette truculence et ce côté direct, pas toujours facile quand on ne le maîtrise pas, je devais parfois m'y reprendre à plusieurs fois et ça finissait souvent à voix haute, pour que je saisisse le sens et la puissance de frappe des mots dits de cette façon là ce qui donne un relief et une couleur bien personnelle qui renforce cette impression d'écriture parlée. L'écriture de Sandra Gordon ne fait pas dans la dentelle, elle est direct du gauche, certaines scénes même font vraiment froid dans le dos, d'autres sont tellement caustiques qu'on en sourit même face à l'adversité, sacrée leçon de vie et d'endurance, quelques phrases courtes lucides aussi qui en disent long: "Ça prend trop de place, du monde absent.", "On est toujours seul avec ce qui se passe à l'intérieur de notre corps." Et puis il y a du suspense, cet écrivain qui erre, des secrets bien gardés, des morts dans les tiroirs, des désirs d'exister, des besoins de comprendre, d'aimer et de l'être, de se maintenir à la vie. J'ai particulièrement aimé les monologues intérieurs de Lucie avec elle-même et cette manière de prendre sa vie et son destin en mains, d'avancer sans se faire de cadeau pas plus d'ailleurs qu'elle n'en a reçu elle-même, un peu comme un parcours initiatique finalement. C'est vrai, on aimerait en savoir davantage, on reste un peu sur sa faim, mais c'est tant mieux je trouve, on a hâte au prochain! 

 

*Lire là les différentes réactions à ce premier roman.

 

 

Commentaires

Bien sûr qu'on a hâte au prochain ! C'est une voix, c'est un style, Sandra Gordon. Pas si courant pour un premier roman, cette maturité de s'être trouvé mais surtout d'affirmer ce qu'on a trouvé.

Juste par le fait qu'elle s'assume, ça rend le style unique. C'est ce que l'on veut d'un auteur, pas une réplique !

Les rédacteurs de La Recrue du mois, webzine dont elle est la vedette tout le mois (du 15 au 15) ont été unanimes pour le style ; il y en a un bien défini. Pour le reste, c'est le regard qui varie selon l'angle où on le place.

Écrit par : Venise | 18/12/2010

Belle Blue, Je n'oublie pas que c'est grâce à toi que j'ai eu accès à l'univers littéraire plus que prometteur de Sandra.
Merci encore de ta douce attention à m'expédier dès ton retour du pays aimé ce livre que j'ai adoré lire, embarquée dès les premières lignes par l'originalité de son style, si abouti déjà, si plein de cet humour décalé qui la caractérise et qui fait d'elle un véritable auteur, sachant restituer dans son récit cru et enlevé son regard distancié que j'aimais tant lire dans ses billets et qui est toujours formidablement présent dans ce roman, en faisant un enchantement du début à la fin.
Pas étonnant que vous vous soyez aimées tout de suite
Je t'embrasse,
Fanfan

Écrit par : piedssurterre | 18/12/2010

@ Venise:

Oui, c'est tout à fait ça, une voix, un style bien à elle, unique et qui lui ressemble. Il y a vraiment congruence entre sa plume et ce qu'elle est en réalité et ça se ressent fort je trouve dans son écriture, et j'aime beaucoup ça!

J'ai lu avec grand intérêt les réactions de la Recrue (mis en lien), et je me suis retrouvée dans celle de Claudion Pinto, et pour tout te dire, j'ai trouvé le regard de Maxime aussi lui ressemblant, vif et frais!

Bien sûr que c'est ce qu'on attend d'un auteur, être surpris, étre remué, être sollicité et être ému aussi! Et bien là on est servi!!

Écrit par : helenablue | 18/12/2010

@ Fanfan:

:-)
Pas étonnant en effet!

Bises itou.
Blue

Écrit par : helenablue | 18/12/2010

Avant toute chose, je tiens à te remercier, Hélènablue pour tous tes efforts afin de faire connaître plusieurs pans de littérature , surtout ceux qui publient pour la première fois comme Sandra, notamment. Tu le fais , il faut le rappeler avec passion; cela se sent à travers ta si belle lecture et la sublime illustration musicale qui t'accompagne.
Concernant Sandra, elle a réussi car elle est devenue un adjectif; dorénavant, on dira Gordonien comme on dit Kafkaïen ou Stendhalien...
En effet, elle est parvenue à marquer son territoire, son atmosphère et à la lecture des "Corpuscules",je m'y suis surpris dans ses particularités, en compagnie de Lucie avec sa quête de sens dans un univers absurde , bêtement agressif et méchant qui nous fait comprendre, sans lourdeurs idéologiques ni tractuelles les causes de la chute et bientôt de l'apocalypse de notre planète, sachant , en termes gestaltiens que le tout est bien plus que la somme des parties , donc ça ne saurait qu'empirer! C'est ce qu'annonce Sandra avec sa galerie de portraits" inter-loques" dont les non-sens et l'intransitivité offrent un parterre à la Bacon où l'écureuil est l'ange emblématique de nos armoiries pourries de mauvaise foi nauséabonde et de petitesse dégoulinant de poisons
insoutenables. Y aura-t-il pire qu'un tel enfer?
Merci Sandra pour tant de style et de lucidité avertissante, merci!

Écrit par : Mokhtar EL Amraoui | 18/12/2010

C'est gagné ! ... tu m'as donné envie de le lire !
Ton enthousiasme est contagieux, je pense avancer en terrain connu dans ce livre.
Merci et bon week-end.

Écrit par : solveig | 18/12/2010

j'veux l'lire j'veux l'lire j'veux l'lire j'veux l'lire j'veux l'lire j'veux l'lire.
Na.

Écrit par : anne des ocreries | 18/12/2010

@ Mokhtar:

Oui, c'est tout à fait ça " Gordonien" ! Un commentaire que je trouve pour ma part particulièrement et purement " Mokhtarien " d'ailleurs...
:-)

Écrit par : helenablue | 19/12/2010

@ Solveig:

Chouette! Tu vas te régaler, crois-moi, jamais rien lu de semblable!
Bon week-end à toi itou.
Blue

Écrit par : helenablue | 19/12/2010

@ anne:

Message reçu cinq sur cinq, on va t'arranger ça, entre Fanfan et moi, une de nous deux peut de prêter son exemplaire ( quoique perso j'aurais bien du mal à me séparer du mien, la dédicace est tellement vivifiante pour moi, rien que ça!) ou alors il y a la solution Pantoute...
Si je le vois à Paname à la librairie québécoise, je t'en prends un, Ok?

Écrit par : helenablue | 19/12/2010

"j'veux l'lire j'veux l'lire j'veux l'lire j'veux l'lire j'veux l'lire j'veux l'lire.", tout pareil...mais je suis plus prêt de la librairie québécoise que toi Anne... je sais donc où aller, et donc 2 exemplaires s'il y a ! :-)

Écrit par : laure K. | 19/12/2010

@ Laure:

Bonne idée!
:-)

Écrit par : helenablue | 19/12/2010

Ouaaaah ! il est bien entendu (concertez-vous les belles) que si quelqu'un l'achète pour moi (c'est à dire que je la mandateà), JE rembourse l'achat !
Et alors, MERCI, hein, pasque Paname, c'est pas demain......Mais, en 2011, j'entrevois du possible...

Écrit par : anne des ocreries | 19/12/2010

ok Anne, c'est noté.

Écrit par : laure | 19/12/2010

bon ben là, faut maintenant que Leméac se bouge un peu pour alimenter au plus crisse une francophonie sans frontière désormais avide de découvrir la verve sans pareille (pour ne dire que ça) de notre Sandra nationale! :)

Écrit par : Le Plumitif | 20/12/2010

Oui, je suis complétement d'accord avec toi Plumitif, je verrais bien un stand Lémeac au salon du livre de Paris avec notre Sandra Gordon internationale!

Écrit par : helenablue | 21/12/2010

oups! t'as raison : c'est effectivement plutôt une Sandra Gordon INTERNATIONALE justement! (méprise d’autant plus impardonnable de ma part que Gaétan Bouchard a précisément conspué tout récemment le patriotisme littéraire en des termes auxquels je ne peux que souscrire : http://blogsimplement.blogspot.com/2010/12/le-libraire.html)

Écrit par : Le Plumitif | 21/12/2010

Oui, j'ai lu aussi la note de Bouchard !
:-)

Écrit par : helenablue | 22/12/2010

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