Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

19/04/2011

L'abécédaire YSL par Pierre Bergé

.
.
.
.
.
.
J'aurais dû titrer l'abébécédaire YSL par Pierre Bergé par Laure Kalangel, car évidemment rien de tout cela ne serait là s'il elle ne s'était pas acharnée et battue becs et ongles pour le faire. Elle nous en parle depuis plus d'un an, au moins je crois, à Laurence et à moi, depuis l'expo haute-couture sur toute la production faste et incroyable de l'inimitable Yves Saint-Laurent, mais voilà, ça prend du temps et du temps et encore du temps et des heures de travail à s'en brûler les yeux, et la bonne image au bon endroit et la fluidité des textes avec la musique, avec le mélange subtilement dosé de la parole de Pierre et de la présence d'Yves; c'est réussi, c'est prenant, c'est émouvant, intelligent, sensible et à l'image de celui dont on parle mais aussi à l'image de Laure, la réalisatrice qui a travaillé non seulement avec sa tête, avec son savoir-faire mais aussi avec son coeur. Telle qu'elle-même, sans renier ses valeurs.

J'ai aimé ce mélange d'images d'époque, l'expression de la mode de l'artiste par ses mannequins noirs et la mouvance des mains de Bergé exprimant son émotion si bien contenue dans cette stature de sphinx qui semble inébranlable mais qu'on sent âme sensible. Je ne peux d'ailleurs imaginer qu'on ait pu aimer un homme tel que monsieur Saint-Laurent sans avoir une sensibilité à part, et ne peux concevoir qu'on ait passé toute sa vie avec lui sans être soi aussi au fond un être créatif et pluriel. le milieu de la mode est si paradoxal, d'ailleurs il le résume bien lui-même avec cette remarque forte disant que la mode n'est pas un art mais qu'il faut un artiste pour la créer. j'ai trouvé beaucoup d'intelligence et de pertinence dans ses propos, et aussi plus frappant encore, une sorte de mesure, de sagesse.

Je ne vais pas reprendre tout l'abécédaire même si j'avoue avoir réagi à chacun des mots choisis, plus particulièrement j'ai été touchée par le mot couple et cette judicieuse phrase de Sacha Guitry: " Un couple, c'est affronter ensemble des difficultés qu'on aurait pas connues si on était resté seul.", ô que oui, comme c'est vrai, c'est aussi vivre ensemble des bonheurs qu'on aurait pas pu connaître seul, mais c'est étonnamment l'adversité et la créativité que met chacun des protagonistes à la dépasser qui soude et fabrique le couple ce en quoi je rejoins Pierre Bergé. Sur la dépendance, bien entendu, on est dépendant, on tend à être libre, on en aime l'idée mais on est malgré tout dépendant si ce n'est de substances ou d'idées en tout cas de soi-même et de son enveloppe corporelle. Comme ce qu'il dit des mauvaises influences, qu'on a pas besoin d'elles si on a décidé de se détruire soi-même, là où je mettrais sans doute un bémol, c'est que parfois on ne le décide même pas et si Yves Saint-Laurent était soumis à de fortes pressions dépressives liées probablement à son enfance ou à son extra-sensorialité ou les deux, pas moyen alors même de décider quoi que ce soit, on est agit, sans savoir pourquoi.

Je retiens de ce portrait beaucoup d'humanité et un bel exemple d'amour partagé, de complicité et de tentative de mettre en application dans sa vie ses convictions et ses principes. Tout cela dans le faste, et avec l'argent, mais le succès entraîne l'argent, pour autant dans le cas de YSL et Bergé, on a le sentiment que ça n'a pas pourri leur relation mais ça leur a permis de l'enrichir, c'est un moindre mal et ça n'est pas fréquent, surtout dans un milieu aussi changeant que la mode qui influe trop souvent sur le mode de vie des gens, il faut côtoyer tout ce monde pour voir à quel point il manque parfois de parole comme celle-ci, de charisme aussi, de profondeur, ce qui est bien dommage.

Merci et encore bravo Laure K. pour ce petit bijou dense et intime qui donne à réfléchir.



Commentaires

@Hélénablue
Je viens à l'instant de donner mon sentiment sur YSL sur le blog de notre adorable Laure et que voici:
YSL est un nom fabuleux, mythique déjà de son vivant! Je suis particulièrement sensible pour ce grand personnage né dans mon pays, l'Algerie, qu'il quitte en 54 au début de la guerre, pour y revenir en 58, combattre et piquer une dépression nerveuse, car bouleversé par cette guerre. Pierre Bergé, son compagnon de toujours,a tenté, par quelques mots, de nous résumer sa vie trés riche, ses souffrances, ses martyres et je saisis vers la fin quelques mots , Laure, sur la sexualité: Il n'y a pas de création sans sexualité.Et moi, j'ajouterai, sans amour, aussi, il n'y a pas de création!
Et j'ajouterai Héléna, que cette dépression nerveuse, dûe à cette maudite guerre, l'a rongé toute sa vie et peut être est ce cela, le catalyseur de tout son génie?

Écrit par : bizak | 19/04/2011

@Laure K
Tout le long de l'interview tout a été monté,je trouve, à partir du regard de Pierre Bergé qui m'a semblé , tout le temps, sur ses gardes pour protéger YSL comme s'il se fût agi d'un enfant sanctifié, voire béatifié. J'y ai retrouvé-l'interview-l'architexture d'un temple et en gardien de ce temple , Pierre Bergé est le berger sémantique des mots et maux d'YSL: il veille au grain afin qu'il n'y ait pas de déformation des sémèmes qui ont explosé de la tendresse géniale et tourmentée du compagnon de vie , de toute une vie et au-delà. Très grande idylle dite avec beaucoup de dignité et
de mesure sachant cacher la démesure d'une passion créatrice qu'il fallait envelopper à l'aide de garde-fous sans l'étouffer;en outre, ce qui m'a frappé dans la trame de cette interview c'est cet oxymore en dualité enchâssante entre le verbe, la disance de Bergé qui serait plutôt apollonnienne raisonnée( du moins en apparence) et le silence créatif dYSL qui ne s'exprime que par l'iconographique dans une sorte de Saint des Saints où le génie se dit en réalisations et rien qu'en ses réalisations pour laisser exploser sa joie enfantine quand l'inspiration a porté, a transporté. Et quels sublimes moments avec la mère recomposant par sa présence amoureuse les fibres de ces trames de très haute couture! C'est tout simplement ce que j'ai ressenti dans cet interview, chère cinépoetesse! Bingo, ta caméra fait, une autre fois, mouche! Et depuis le temps, tu sais que je ne fais pas dans la complaisance!

Écrit par : Mokhtar EL Amraoui | 19/04/2011

@Mokhtar
Merci de ce commentaire analytique, et à ta façon, je suis en accord avec tes dires.
Dignité et respect sont les deux mots qui me viennent pour évoquer cette réalisation.
Yves Saint Laurent de dos, oui, j'ai préféré cette posture, le temps ayant fait son office, dans sa solitude créatrice et angoissante, ce corps défait par le monstre Création, une vie au service de... des femmes surtout,
" Chanel leurs a donné un style, toi tu leur a donné le pouvoir" disait Pierre Bergé.
Mais aussi eut envie de l'entendre rire, vivant, piquant, toujours traversé de sa sensibilité à fleur de peau.
Bergé c'est autre chose, un rempart, mais un rempart fissuré et blessé, ça se sent je crois, malgré cet aura diabolique qu' on lui confère. Je n' ai jamais songé à voir en lui cet aspect seulement, ne le connaissant pas tellement cet homme là. Je me rappelle, scruptant l' image à me demander qui était-il, d'ailleurs, je ne savais pas grand chose de lui.
C'est après, au montage, que l' on découvre l' autre. Un geste, un rictus, un battement de paupières... je tiens compte de tout.
Il nous a livré ici quelques instants intimes; ses mains parlent beaucoup, adroites et maitrisant le sanctuaire, parfois elles s'échappent pour revenir fermer la parole. Je les ait beaucoup disséqués ses gestes, notamment en y appliquant un léger flou autour, et j'ai finit par les digérer, ainsi que son débit. D'où une évident sens de la maîtrise.

L' esprit St Laurent était beaucoup plus imposant, photographies aux murs, peinture de Wharol, empilements de cartons de papiers, une K7 de La Callas encore présente dans un vieux magnétophone, des objets d'art, sculptures en plâtre de sa main, dessins de Cocteau... ça oui, c'était impressionnant.

L'oeil caméra est une chose, mais la caméra demeurait fixe ici, seulement des changements d'échelle de plans.
C'est le montage qui conditionne le discours: le choix des photos, le choix des extraits, le choix des accords musicaux, les trucages, l' étalonnage de l'image et l'habillage ... faire du sur mesure prend un temps infini.

Écrit par : laure K. | 20/04/2011

@Bizak

Je crois qu'il se savait différent, qu 'il en a beaucoup souffert et a pris sa revanche... Il avait déclaré d'ailleurs à sa famille: "Un jour j'aurais mon nom en lettre d'or sur les Champs-Elysées."

Écrit par : laure K. | 20/04/2011

BRAVO ! cette vidéo est magnifique, je ne connaissais Pierre Bergé que de nom, et je découvre un sacré Grand Bonhomme !!!

Écrit par : anne des ocreries | 20/04/2011

Les commentaires sont fermés.