01/12/2011
Emil Nolde
" La fidélité et la précision dans la reproduction de la nature ne font pas une oeuvre. Une figure semblable à s'y méprendre à son modèle n'inspire que du dégoût. Eprouver la nature en y insuflant sa propre âme, son esprit, transforme à l'inverse le travail du peintre en art."
- Emil Nolde -
Emil Nolde est un fils de paysan né le 7 août 1867 à Nolde et mort le 13 avril 1956 à Seebüll. Son vrai nom est Emil Hansen, il a pris le nom de son village natal, aux confins de l'Allemagne et du Danemark.
Nolde a près de 30 ans quand il peint son premier tableau, il se dirige d'abord vers la sculpture ornemantiste sur bois, devient ensuite professeur de dessin à Saint-Gall (Suisse) et se forme à Munich et à Paris en 1900. Passé en 1906 par le mouvement expressionniste Die Brücke (le pont), à Dresde, il crée en 1910 la Nouvelle Sécession. Nolde devient l'un des pontes de l'art allemand et s'impose comme le chef de file du courant expressionniste allemand.
L'homme est pétri de contradictions : attaché à sa terre et voyageur (la Papouasie et la Nouvelle-Guinée), avant-gardiste et rustique... Il se dit solitaire et inculte, mais aime les honneurs et s'implique dans des querelles d'écoles; il se voit mal-aimé, mais est reconnu dès les années 1920.
Fils spirituel d'Edvard Munch et de Vincent Van Gogh, Nolde est capable d'exprimer par son pinceau fougueux et sa palette de feu les tourments d'une âme exaltée. La couleur, employée en toute liberté, le dessin, incisif et sans concession, sont au service d'une vision émerveillée et tragique, où s'expriment le sentiment de la nature et le mystère des origines.
Les sujets religieux peints par Nolde bouleversent toutes les tentatives faites dans ce domaine à l'époque moderne. Ses peintures comme le polyptique La vie du Christ (1909-1912), sont plus proches du profane que du sacré, du primitif, du populaire que du sublime. Les personnages sont grotesques ou inquiétants, les couleurs explosives, le tout emprunt de rusticité et d'expressivité. Nolde est un protestant convaincu, mais sa foi a des accents mystiques, païens.
Profondément rural, Nolde entretient avec la ville un rapport ambigu, entre dégoût et fascination. Il passe souvent l'hiver à Berlin, participe à son avant-garde, mais ne tarde jamais à reprendre ses distances. Sa série sur les nuits de Berlin, peinte dans les années 1910, est à l'image de cette ambivalence : il y exprime à la fois la fête, la vie, et un sentiment de décadence.
Son rapport au nazisme n'est pas le dernier de ses mystères. D'abord sympathisant, à la fois par opportunisme et par patriotisme, il est admiré par Goebbels... mais haï par Hitler, et il est rapidement mis au ban par le régime. Il est alors frappé d'une interdiction de peindre, certaines de ses toiles seront montrées en 1937 par les nazis dans leur expo dénonçant "l'art dégénéré" et environ 1 052 de ses oeuvres conservées dans des musées allemands sont vendues à l'étranger, ou brûlées.
Malgré la Gestapo qui veille ( elle passe souvent chez lui) , Nolde, âgé de plus de 70 ans, crée clandestinement environ 1300 aquarelles dites "les images non peintes". L’après-guerre sera plus clémente. La reconnaissance internationale ne tarde plus. De son vivant, Nolde aura l'honneur d’être consacré comme l’un des artistes les plus importants du XXe siècle.
Jusqu'a sa mort à l'âge de 89 ans, Nolde aura en lui un besoin vital de peindre qui a imprégné chacune de ses toiles. Il nous laisse laisse une oeuvre foisonnante qui continue de dialoguer aujourd'hui avec l'art le plus contemporain.
" Les hommes primitifs vivent dans leur nature, ils ne font qu’un avec elle et sont une partie du cosmos tout entier. J’ai parfois le sentiment qu’eux seuls sont encore de véritables hommes, et nous quelque chose comme des poupées articulées, déformées, artificielles et pleines de morgue."
- Emil Nolde -
06:38 Publié dans art | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : art, peinture, emil nolde, passion, découverte, voyage, partage, humain
Commentaires
j'ai pris 5 minutes pour parcourir ce billet du jour, une dose de bouffée d'air primitive à travers les oeuvres de Nolde. je reviendrais, sapristiche, c'est fameux !
;-)
Écrit par : laure k.. | 01/12/2011
Incontournable peinture!
Écrit par : versus | 01/12/2011
Ton blog rivalise avec les plus grands musées, c'est un régal de te suivre images et mots...Ce Nolde me crie des hommes , des voyages et des peurs avec des couleurs dans la démesure. Jouons à nous faire plaisir: j'achète virtuellement cet orage violent sur une mer sans concession!
Écrit par : Manouche | 01/12/2011
on a l'impression de se balader dans un musée consacré à NOLDE Tout et beau et parfaitement expliqué comme dans un catalogue. La peinture de cet artiste méconnu est si éclatante que l'on a l'impression qu'il a peint des vitraux
Merci !
Écrit par : alex | 02/12/2011
J'aime beaucoup!
Écrit par : Guillaume Lajeunesse | 02/12/2011
Une découverte (une révélation ?).
Merci.
Écrit par : Mike Blette | 02/12/2011
J'avais vu l'expo qui lui était consacrée au Grand Palais et j'avais écrit un billet, mais beaucoup moins fouillé que le tien. Quel peintre étonnant et injustement moins connu que certains de ses contemporains. J'avais beaucoup aimé les petites aquarelles peintes en catimini pour échapper au Nazis.
Écrit par : Zoë Lucider | 04/12/2011
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