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12/04/2012

On se découvre face à l'adversité.

Son premier mail m'a déroutée. Faut bien dire que je n'ai  pas particulièrement de relation avec Jean si ce n'est au travers de Christian et que c'est la première fois que je reçois un mail directement de lui. Pourtant, j'en garde un souvenir diffus quand je l'ai eu au téléphone parce qu'inquiète d'être sans nouvelles de Christian qui ne me donnait plus signe de vie d'un coup d'un seul presque au milieu d'une phrase et que ça ne lui ressemblait guère. A cette époque lointaine, je n'avais pas les moyens de joindre Christian directement, et, sachant que Jean Barbe était son ami, je me suis tournée vers lui, seul à être dans l'annuaire international. Une brève rencontre ponctuée de pleurs d'enfants, il a été chaleureux et disponible, me rassurant d'un "Je vais aux nouvelles, je vous reviens!".

C'était un autre temps. Celui où l'un comptait sur l'autre et savait possible et incontournable la disponibilité de l'un à l'autre comme dans toute amitié qui se respecte. Du moins dans l'idée que je me fais de toute amitié qui se respecte.
 
Aujourd'hui, c'est la guerre! Une guerre de tranchée, injustifiée.
C'est difficile d'entendre un ami qui ne pense pas comme toi et qui t'alerte sur le chemin que tu prends de son point de vue. Un guerrier qui n'aime pas un opportuniste, ça tombe sous le sens, c'est même une chance d'avoir en face de soi quelqu'un qui met son exigence à ton service.
Faut être bien démuni ou trop rageux pour m'écrire et me demander implicitement de rendre la raison à Mistral! Faut être ignorant des choses de la vie ou feindre de les ignorer pour autrui, faut pas penser qu'une amitié existe, qu'elle compte, qu'elle a pour ses protagonistes une valeur sacrée, faut être dans une autre réalité. Le premier message de Jean m'a remuée:
 
Il et devenu fou. Il me menace. La fille dont il parle est mon amoureuse.Elle va publier dans une autre maison que celle où je travaille. 
Il est tellement coké, il me fait des menaces.

Ah! Mais de qui il parle là! Spontanément, j'ai répondu à ce message de cette manière chez Christian, et, encore, par chance, Christian avait devancé Jean qui l'avait menacé de m'écrire, faut dire, on est en plein délire!
Christian est mon ami, il est plus qu'un ami pour moi. Ce qui nous unit ne regarde que nous mais je crois pouvoir dire qu'il ferait pour moi ce que je fais pour lui, que nous comptons l'un sur l'autre, que nous nous épaulons, que nous nous inspirons, que nous nous motivons, que nous nous épanouissons. Il faut du temps pour qu'une telle relation s'installe, faut apprendre à se connaître, nous ne sommes parfaits ni l'un ni l'autre mais nous tendons à devenir meilleurs en nous ouvrant l'un à l'autre, n'est-ce -pas là la signification même de l'amitié?
Jean et Christian sont amis, de longue date. Ils ont du en voir et en endurer ensemble, ils ont du certainement s'épauler, se détester, se revenir. Alors pourquoi faut-il que d'un seul coup l'un se présente en victime et pointe d'un doigt accusateur l'autre en disant qu'il devient fou? "Quand tu veux tuer ton chien, tu dis qu'il a la rage." Quel est donc le dessein de Jean Barbe?
Après m'être exprimée sur le Vacuum en réponse à ce mail, j'ai cru m'être fait comprendre, n'avais-je pas été claire? Non, ça n'a pas suffit, j'ai reçu un deuxième message, différent, plus agressif me concernant:
 
Bravo, vous êtes bien manipulée.
Et totalement à côté de vos pompes.
Traîner une femme dans la boue, c'est votre idée de la littérature?
Adieu Madame.

Ouch, et vas-y que je t'envoie mon skud. J'ai demandé ce qu'il tentait de me dire, moi traîner une femme dans la boue! Et puis j'ai réfléchi, j'ai dormi dessus comme on dit chez nous, je n'ai pas apprécié ce jugement à l'emporte pièce, même quelqu'un qui n'a pas un ego démesuré en a un, et pourquoi allais-je le laisser ainsi penser que j'étais manipulée comme si Mistral était un gourou, que j'en avais peur ou que sais-je, comme si Mistral était intouchable et que j'étais une sorte de beni-oui-oui, comme si la relation entre Christian et moi n'avait aucune valeur, presque à deux doigts de me dire que j'étais cinglée et que je n'ai pas toute ma raison, mon père me l'a dit, ma mère aussi et maintenant ce Monsieur que je ne connais pas et pour qui je n'avais jusqu'ici que de l'estime, les amis de mes amis étant mes amis! Fichtre! 
 
Jean,
Vous ne me comprenez pas, vous ne me connaissez pas à vous lire. A quoi tentez-vous d'aboutir? Pourquoi cette diabolisation? Pourquoi cette tentative d'humiliation à mon égard? Pourquoi vous en prendre ainsi à moi parce que j'aime Christian? Pourquoi l'amour que je lui porte vous pousse à croire que je suis stupide? Ignorez-vous à ce point quel homme généreux il est, vous, son vieil ami? Ignorez-vous à quel point sa lucidité fait mouche et que c'est sans doute ça qui vous touche? Que craignez-vous pour que votre peur vous aveugle à ce point?
Je l'ignore, mais je vous plains.
Vous savez tout comme moi que toute communication est manipulation et c'est le coeur du différend qui vous séparent, vous savez tout comme moi que je suis loin d'avoir les pieds en dehors des sabots, que je suis une femme posée, lucide, entière, consciente, que je n'agis que rarement sous la colère, et vous devriez savoir que j'ai une haute idée de la littérature et de la valeur des mots et que je mesure les miens en vous écrivant, et qu'enfin je n'ai jamais traîné de femme dans la boue et que je serais la première à sortir les griffes si cela devait se produire. Il y a pour moi une différence notable entre se défendre et agresser. On ne s'adresse pas à un fauve comme à un mouton, on ne peut attendre d'un loup d'être un chihuahua ni d'un serpent d'être une limace. Question de caractère, question de relation, question d'idée qu'on se fait des uns des autres. Si on veut vivre paisible dans sa petite vie tranquille avec ses petits travers à pouvoir agir en toute impunité comme bon nous semble alors on n'a pas dans son carnet d'adresse en pole position Christian Mistral en ami et en agitateur de conscience. J'ai la mienne, elle me sied, parfois elle me fait souffrir aussi. Au fond je devrais vous dire merci, quel meilleur moment pour revendiquer mon amitié sans faille pour Christian?
A vous lire, Monsieur.

Tout ceci pourrait paraître ridicule et puéril mais ne l'est point. Il est question de la dignité d'un homme, de son intégrité, de sa valeur.
La demoiselle chère au coeur de Barbe a bien cherché la bête en insultant le travail de Christian, en discréditant son oeuvre, son écriture le disant has-been et au bout de son art! Encore une affirmation non fondée, a-t-elle au moins lu toute l'oeuvre de Mistral qui emmène à bout de souffle, ciselée, précise et percutante? A-t-elle la moindre idée de ce qui anime cet homme, de sa capacité réflexive, de son implication dans la création littéraire, de sa force  et de sa générosité? Qu'attend donc de moi, my god, un Jean Barbe, droit dans ses bottes, s'attribuant avec panache un combat qui n'est pas le sien pour plaire à sa belle plutôt que de donner une tribune à tous ces jeunes qui auraient tant à dire et qu'on aimerait entendre davantage? Sigh. Pour ma part, il peut bien faire ce qu'il veut de sa vie, il peut bien défendre les valeurs qu'il souhaite tant qu'elles ne viennent pas empiéter sur les miennes. 
Comment peut-on prétendre défendre plus de justice, plus d'éducation et plus d'avenir en employant des méthodes humiliantes et en agitant les vieux démons et les vieilles histoires comme ceux qui tirent sur les ambulances? Québécoise de coeur, je défends comme je peux une valeur qui m'est chère et qui fait partie de celle que je transmets chaque jour à mes enfants: la fidélité. La fidélité à celle ou à celui qu'on est, la fidélité à l'intégrité, à ce pourquoi on se bat et la fidélité à ceux qu'on aime, à l'amitié, à la fraternité et à la liberté, à laquelle on aspire, tous, autant que nous sommes.
 
LB