04/07/2011
La mort, la vie, l'amour
J'ai cru pouvoir briser la profondeur de l'immensité
Par mon chagrin tout nu sans contact sans écho
Je me suis étendu dans ma prison aux portes vierges
Comme un mort raisonnable qui a su mourir
Un mort non couronné sinon de son néant
Je me suis étendu sur les vagues absurdes
Du poison absorbé par amour de la cendre
La solitude m'a semblé plus vive que le sang
Je voulais désunir la vie
Je voulais partager la mort avec la mort
Rendre mon cœur au vide et le vide à la vie
Tout effacer qu'il n'y ait rien ni vitre ni buée
Ni rien devant ni rien derrière rien entier
J'avais éliminé le glaçon des mains jointes
J'avais éliminé l'hivernale ossature
Du vœu qui s'annule
Tu es venue le feu s'est alors ranimé
L'ombre a cédé le froid d'en bas s'est étoilé
Et la terre s'est recouverte
De ta chair claire et je me suis senti léger
Tu es venue la solitude était vaincue
J'avais un guide sur la terre je savais
Me diriger je me savais démesuré
J'avançais je gagnais de l'espace et du temps
J'allais vers toi j'allais sans fin vers la lumière
La vie avait un corps l'espoir tendait sa voile
Le sommeil ruisselait de rêves et la nuit
Promettait à l'aurore des regards confiants
Les rayons de tes bras entrouvraient le brouillard
Ta bouche était mouillée des premières rosées
Le repos ébloui remplaçait la fatigue
Et j'adorais l'amour comme à mes premiers jours.
Les champs sont labourés les usines rayonnent
Et le blé fait son nid dans une houle énorme
La moisson la vendange ont des témoins sans nombre
Rien n'est simple ni singulier
La mer est dans les yeux du ciel ou de la nuit
La forêt donne aux arbres la sécurité
Et les murs des maisons ont une peau commune
Et les routes toujours se croisent.
Les hommes sont faits pour s'entendre
Pour se comprendre pour s'aimer
Ont des enfants qui deviendront pères des hommes
Ont des enfants sans feu ni lieu
Qui réinventeront les hommes
Et la nature et leur patrie
Celle de tous les hommes
Celle de tous les temps.
- Paul Eluard -
09:37 Publié dans photographie, poésie | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : poésie, paul éluard, photographie, bianca van der werf, art, découverte, partage, humain
Commentaires
Frémissant ! texte et image, beaux.
Écrit par : anne des ocreries | 04/07/2011
Eluard, Quel souffle ! je le prends pour mes voiles
La photo là-haut et celles du site dédié, je les garde au fond chaud de ma besace, et poursuis ma route.
- Thanks Blue -
Écrit par : laure K. | 04/07/2011
Ah! Quand j'ai découvert le travail de cette photographe, j'ai tout de suite pensé à toi, Laure, héhé!
Bonne route ma belle et à tout bientôt!
Kiss
Blue
Écrit par : helenablue | 04/07/2011
:-)
Écrit par : laure K. | 04/07/2011
Dear Blue,
Merci! Je viens de rentrer de ma première baignade de l'année et qu'est-ce que je trouve? Ce superbe hymne à l'amour d'Eluard. L'amour, le seul antidote contre la mort. Aimer c'est la seule véritable preuve de vie!
Écrit par : Mokhtar EL Amraoui | 04/07/2011
@ Mokhtar:
Magnifique, oui, ce poème d'Eluard qui fait partie de mes poètes de prédilection!
Aimer c'est être vivant! Je te rejoins et je le rejoins aussi dans cette idée si superbement mise en mots ici!
Oh! Premier bain de l'année, tu dis, l'eau doit être douce par chez toi. Non comme chez nous où on se risque que le bout du doigt de pied à moins de s'être forgé un tempérament d'acier trempé!
Raconte nous la plage, l'eau, l'air, qu'on en profite un peu nous aussi!
Écrit par : helenablue | 04/07/2011
Éluard ! Que d'espaces féconds ! En le lisant, j'oublie les mots. C'est un grand rêve, une nuit claire où s'enchaînent d'impalpables résolutions du coeur, des bouffées de joie succédant à d'autres jaillissements heureux, une mosaïque d'éther qui enivre, un rêve peuplé de tourments éclipsés par l'amour.
Écrit par : Guillaume L. | 04/07/2011
Question plage, tu as l'embarras du choix; des kilomètres de plage avec un indescriptible sable fin et doré. Une eau diaphane et très "blue", bien limpide. On a le choix entre des endroits hypergrouillants et d'autres pour ceux qui préfèrent la solitude ou un petit endroit pour tourtereaux, à l'abri des regards indiscrets. Il y a même une pinède où on peut faire une belle sieste revigorante pour revenir replonger dans l'eau et le cycle continue. C'est à découvrir!
Écrit par : Mokhtar EL Amraoui | 04/07/2011
Jolie texte. Je suis assez hermétique à la poésie mais quelque part votre poème m'a touché :)
Bonne continuation !
Écrit par : Photographe publicitaire | 06/07/2011
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