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30/04/2012

l'amour et le militant

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Création Marie Labarelle - Photographie Matthieu Gauchet -

 

Ce que la mer chante à des milles d’ici

La force de ton ventre, le besoin absolu

De m’ériger en toi

Voici que mes bras mâles amour s’ébranlent

Pour les confondre en une seule étendue

 

Ce que la terre dans l’alchimie de ses règnes

Abandonne et transmue en noueuses genéses

De même je l’accomplis en homme concret

Dans l’arborescence de l’espèce humaine

Et le destin qui me lie à toi et aux nôtres

 

Si j’étais mort avant de te connaître

Ma vie n’aurait jamais été que le fil rompu

Pour la mémoire et pour la trace

Je n’aurais rien su de mon corps après la mort

Ni des grands fonds de la durée

Rien de la tendresse au long cours de tes gestes

Cette vie notre éternité qui traverse la mort

 

Et je n’en finis pas d’écouter les mondes

Au long de tes hanches…

 

- Gaston Miron -

 

29/04/2012

de tout coeur

avec les étudiants québécois.

 

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26/04/2012

voyage, voyage...

" Les voyages sont l'éducation de la jeunesse et l'expérience de la vieillesse."

- Françis Bacon -

 

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- Carte du voyage de La Pérouse -

 

 

 J'ai toujours aimé voyager, "frotter et limer ma cervelle à celle d'autrui" comme le disait Montaigne, j'ai toujours eu le sentiment que c'était un excellent moyen de développer son intelligence, en changeant sa forme de pensée et de vie, en devant s'adapter à d'autres manières de voir, en goûtant à une autre réalité. J'ai toujours aimé et j'en ai depuis longtemps senti le besoin, pour fuir sans doute l'autarcie dans laquelle j'ai été élevée et par conviction, par nécessité d'explorer. Pas seulement partir pour partir, mais partir pour revenir enrichie et rassérénée. Depuis quelques années, j'ai dû réduire la fréquence de ces découvertes du monde et ça me manque. La dernière en date est Montréal, courte et bréve incursion québécoise chargée d'émotions, une bouffée d'air dans ma vie d'aliénée et de travailleuse acharnée. J'ai décidé de repartir, de m'en donner à nouveau les moyens; trop besoin de remettre ma tête entre les mains de l'imprévu et de l'aventure, trop envie d'horizons pas encore ressentis et trop la certitude qu'il y a beaucoup à découvrir. Avanti!

 

  

25/04/2012

sens de l'humour

Croisée au hasard de mes lectures du jour cette savoureuse phrase de Winston Churchill qui, en réponse à Lady Astor qui lui avait déclaré: "Monsieur, si vous étiez mon mari, je vous verserais du poison dans votre verre", répliqua: "Madame, si vous étiez ma femme, je le boirais."

 

exprimer par son corps

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- Photographie d'André Kertész -

 

L'être humain "confectionne" son corps comme on confectionne une robe pour se protéger d'une nudié trop crue. Rougir pour ne pas exprimer son désir, sa culpabilité ou sa honte est un des exemples les plus évidents. L'écriture ( maquillage, vêtements), et par là même la lecture du corps qu'elle induit, fait comprendre ce qu'on souhaite en partie se cacher et cacher aux autres. La manière dont notre corps s'exprime et dont nous le faisons s'exprimer est un compromis qui nous protège d'une manifestation trop claire de nos désirs et de nos peurs. S'intéresser à la façon dont, volontairement ou pas, notre corps parle pour nous revient à décrypter un ensemble de signes, les uns affichés, les autres tus, dont le but est de nous protéger de nos pulsions et de nos angoisses. Aussi, quand notre corps manifeste certains signes de souffrance sans qu'il y ait de maladie somatique avérée, il est important de s'interroger sur ce que ces manifestations dissimulent et sur l'éventuelle protection que cette douleur, visible et anxiogène, pourrait assurer contre une irritation ou une angoisse plus profonde.

Aux mots se substituent les maux.

- Alain Braconnier - Protéger son soi

 

 

24/04/2012

Le petit Robert

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La langue française est une femme, nous suggère Anatole France. Et cette femme est si belle, si fière, si modeste, si hardie, touchante, voluptueuse, chaste, noble, familière, folle, sage, parle-t-il de moi?, qu'on l'aime de toute son âme, et qu'on est jamais tenté de lui être infidèle, je n'aimerais pas ça! Il y a longtemps que je pense me l'offrir celui-là, aujourd'hui me semble un bon jour. Je ne sais plus quel écrivain a dit: "Un dictionnaire, c'est un roman sauf que tous les mots sont rangés dans l'ordre!", hâte de plonger mon nez dans ce précieux coffret...

 

23/04/2012

Le jour de la Terre

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Hier, quelle coïncidence, Christian m'informait que c'était le jour de la Terre et qu'au moment même où il m'écrivait les cloches de toutes les églises de Montréal sonnaient pour deux minutes, qu'une manifestation de plus de 100 000 québécois s'ébranlait et que même des femmes innues venues à pied de Malioténam y participaient. Moi, pendant ce temps j'étais abasourdie devant ma télé à ne pas croire le chiffre qui m'était annoncé. Le matin de ce Dimanche 22, j'avais visionné une interview réjouissante de Michel Serres à l'occasion de la sortie de son nouveau livre: Petite Poucette; ses propos m'avaient mise en émoi et m'avaient donné confiance, je suis tellement d'accord avec ce qu'il dit, c'est tellement bon de l'entendre. Et là, un 20% s'affichait, plus de six millions de français avaient préféré la xénophobie, le repli sur soi, l'intolérance, l'étriqué, la préférence nationale, la régression, la démagogie, l'insensé. Les urnes avaient parlé.

Ce matin, au petit déjeuner, on était tous levés tôt, tous avec la mine défaite et avec un goût amer au fond du gosier, la démocratie n'est pas toujours aisée à avaler quand elle ne défend pas des valeurs auxquelles on tient de solidarité, d'humanité, d'intelligence. Chacun y allait de son couplet, chacun tentait de donner une explication à cette vague extrémiste de doite: l'ignorance, la peur, le ras-le-bol, l'ignorance surtout: comment peut-on penser que la voie pour une vie meilleure et une société plus juste est la mise à l'index de l'autre? Prendre ses responsabiités, c'est s'affirmer, c'est dire je ne suis pas d'accord, je veux autre chose pour moi, pour mes enfants; prendre ses responsabilités c'est oeuvrer pour que cessent ces idées préconcues, c'est s'ouvrir, c'est expliquer, c'est comprendre que le monde change et que rien ne peut plus être comme avant pour paraphraser la Marine, comment peut-il en être autrement?

Alors je repense à Michel et à son concept de petite poucette, et même si je n'ai plus vingt ans et si je ne suis pas aussi habile de mes pouces que mes grands enfants, je pense l'être de la tête, du moins je tente de l'être, je tente de comprendre ce monde dans lequel nous évoluons tous, dans lequel il nous faut exister, avec lequel il faut composer, je cherche à être au plus prés de ce que je veux vivre et de ce que je veux transmettre, au plus prés de ce qui me semble juste et justifié et je suis d'accord avec Serres: ce qu'il y a de mieux à faire c'est être soi-même et c'est bien ce que je compte revendiquer encore davantage même si j'ai toujours dit ça à mes fils depuis leur naissance: Be yourself! Je compte mettre tant bien que mal ma pierre à l'édifice à ce monde mouvant et spectaculaire et à cette aventure géniale qu'est la vie sur cette planète en montrant qu'il est possible de s'ouvrir aux autres sans craindre pour sa peau, qu'il est possible d'aimer la différence et de s'en enrichir, qu'il est souhaitable de s'aventurer et que la peur n'est pas bonne conseillère, la haine non plus, ni même la colère. Réagir n'est pas une solution, mais agir, oui, exprimer, partager et ne pas craindre de penser autrement, de penser plus grand, de penser plus vaste et plus aimant.

C'est tous les jours le jour de la terre, c'est ici, c'est maintenant.

 

22/04/2012

la marche à l'amour

 

de l'acte de voter

Voter. Pour beaucoup de mes congénères ça n'a plus guère de sens: "pourquoi faire?", "pourquoi dire?", "c'est plié d'avance", "ça sert à rien"... Même mes jeunes! il a fallu que je les motive en leur expliquant que c'était un moyen d'exprimer notre volonté , que c'était un des droit fondamental d'une démocratie, qu'on ne peut voter depuis l'âge de dix-huit ans que depuis peu et que pour les femmes c'est encore tout frais, juste plus d'un demi-siècle, qu'il faut y aller. " Maman, c'est bonnet blanc et blanc bonnet", "sont tous pareils", "sont tous pourris"...Ben, pas tout à fait quand même! Et puis si c'est vraiment le fond de ta pensée, faut aller le crier, voter blanc, mais pas te défiler. C'est pas la panacée, on ne va probablement pas changer le monde avec juste un bulletin dans une urne mais le geste n'est pas anodin, notre avenir est en notre nos mains, et ça c'est un des moyens qui s'offre à nous, en toute légitimité, il n'y a pas à hésiter, faut que t'ailles voter! On verra ce soir ce qu'il sera advenu de ces multiples conversations ces jours derniers, en attendant... j'y vais.

 

21/04/2012

pensée du jour

 Lue chez Lyse.

 

" Ce n'est pas ce que tu réussis qui importe, mais la qualité de ce que tu tentes."

- Karen BLixen -

 

 

17/04/2012

Une Vague Blanche pour la Syrie

 

16/04/2012

Lille Art Fair 2012, voyage au bout de l'art...

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Tous ceux qui passent ici connaissent mon intérêt pour l'art et plus particulièrement pour la peinture et la sculpture d'hier à aujourd'hui, nul n'ignore à quel point l'émotion que peut produire la rencontre avec une toile qui me touche ou une oeuvre qui me trouble compte pour moi. J'ai beaucoup avancé grâce à mes remue-méninges liés à ces rencontres et je continue de l'être, enchantée de ressentir combien c'est important, combien ça m'enrichit et combien ça émoustille mon imaginaire. Je ne risquais pas de louper cette 5 ème édition de la Art Fair Lilloise, d'autant que l'année dernière j'avais été particulièrement enthousiasmée de ce que j'avais pu y voir. Cette année encore, ce fut riche et remuant. Faut que je vous raconte...

Nous nous sommes décidés après le déjeuner familial dominical, le fameux poulet-purée partagé dans une ambiance détendue et animée. Pat était tout aussi motivé que moi. Le Grand Palais est à deux ou trois encablures de la maison, il faisait un temps frais et lumineux, une petite ballade digestive avec en dessert tant de belles surprises ne pouvait que nous faire le plus grand bien. Le grand YES de Jacques Villeglé plus connu pour ses collages que pour son oeuvre scuplturale nous a donné le ton avant même d'entrer. 

 

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- Jacques Villeglé -

 

Et c'est avec Guy Ferrer que nous avons ouvert le bal!

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- Guy Ferrer -

 

J'ai été incommodée dans mon plaisir par de fortes odeurs de cuisine, je suis peut-être chochotte  et sensible des naseaux, n'empêche que je n'ai pas apprécié la sensation en m'enfonçaont de plus en plus dans la foire. Sans doute ai-je besoin d'un peu plus de sérénité et d'élégance dans l'ambiance pour pouvoir apprécier à leur juste valeurs les oeuvres exposées et laisser venir à moi toutes les émotions qu'ells suscitent. Dieu soit loué, il n'y avait pas de musique ni d'annonces intempestives d'un haut-parleur criard. C'est une foire, oui, mais ça n'est pas la foire tout de même!

Il y avait un monde fou, tant mieux, ça fait toujours plaisir de voir autant de jeunes s'ouvrir l'esprit et puis beaucoup d'enfants aussi, il y a encore des parents qui pensent que c'est nécessaire pour leur épanouissement, c'est heureux. Mes parents n'étaient pas friands d'art pas plus qu'ils ne l'étaient de littérature, je suis une véritable autodidacte en ce domaine et je dois beaucoup à mon homme  qui m'a offert d'accéder à ce monde insensé et qui m'a cultivé en ce sens. Néanmoins je garde toujours mon regard d'ignorante, et me fiche souvent de savoir le comment du pourquoi préférant me laisser happer par ce que je ressens et ce que j'interpéte. Comme ce choc  que j'ai eu devant les toiles de Liu Zhengyong.

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- Toiles de Liu Zhengyong -

 

"Un travail à l'huile qui traduit des sentiments profonds et lourds, qui reflètent le coeur, la pensée ou même des expériences complexes rencontrés dans la société. Une force dans la charge émotionelle qui donne au langage de Liu Zhengyong, une portée universelle." Un jeune artiste chinois de 32 ans...

Après être restée une bonne dizaine de minutes devant la toile de Liu, mon oeil et tout de moi furent attirés par une toile évanescente et lumineuse. Je m'approche plus près, le titre me ravit et m'entraine, la poésie des mots associée à l'image: l'homme qui marche dans les ciels, une toile de Claude Floch, un voyage à elle toute seule.

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- Claude Floch -

 

L'après-midi promettait d'être chargée et réjouissante. Et là aux détours d'une allée, encore un moment de grâce avec Catherine Seher.

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- Toiles de Catherine Seher -

 

Je serre quelques pinces an passant, à moitié ailleurs, mes interlocuteurs doivent ne pas trop me sentir avec eux sauf mon amie Constance que je n'avais pas vu depuis un bail et que j'ai été heureuse de retrouver avec son doux et ses deux filles toujours pleine de curiosité, on a bavardé quelques minutes, j'ai remarqué l'intensité de son rouge à lèvres, et puis on s'est dit qu'on déjeunerait bien ensemble un jour prochain. C'est à un déjeuner avec elle que je dois la création de mon blog, elle m'y a fortement encouragée, elle savait que j'aimerais communiquer, partager, exprimer, et que j'en aurais besoin. Je n'imaginais pas il y a quatre ans à quel point! 

Nous continuons, Pat et moi nos périgrinations. Il ne peut pas ne pas immortaliser cette rencontre avec l'ours de Pompon, pour lui comme pour moi, c'est tout un symbole! C'est en quelque sorte notre mascotte! 

 

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- Hommage à François Pompon - Yves Gaumetou -

 

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- Ben -

 

J'avais deux amies galeristes à voir. Par hasard je tombe sur la première, j'ai reconnu de loin une artiste qu'elle affectionne tout particulièrement, moi aussi, j'avais découvert ses toiles l'année dernière ici aussi. Isabelle Vialle. Par bonheur l'artiste est là et je découvre ce petit bout de femme charmante qui peint ces toiles si bouleversantes. La galerie Naclil est tout près de ma boutique et j'ai toujours du plaisir à y passer. Béatrice et moi avons des goûts convergents et le sculpteur qu'elle présente à la Art Fair, ne me laisse pas indifférente non plus, même qu'il me dérange, ses écorchés sont décapants!

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 - Toiles d'Isabelle Vialle -

 

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 - Sculptures de Marc Petit -

 

Bon, décidément, je ne suis pas au bout de mes surprises, notre venue ici me ravit et je finis par en oublier les odeurs qui m'avaient agressée au début de ma ballade. Là, une fois de plus je m'arrête devant cette pièce étonnante. Ne sommes-nous pas composé ainsi d'une suite de strates?

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 - Isabelle Miramontes -

 

Et puis ce tableau stupéfiant et symbolique de Bertrand Lefebvre, et puis ces tableaux que mon apprareil photo à mis dans la boîte et dont je n'ai pas relevé les noms d'auteur mais, qui m'interpellant les uns et les autres pour des raisons différentes, me donnent envie de les partager avec vous, leur ayant donné un nom moi-même: La belle inconnue, dîner de famille et petite fille perdue.

 

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- Bertand Lefebvre -

 

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Vingt exposants de plus que l'année dernière, donc plus de chance encore de faire des rencontres. Cette Art Fair regorge de trésors, qui a dit que l'art contemporain était mort? Enfin j'arrive chez mon ami Guylaine, que je connais depuis quelques années maintenant. Je l'ai rencontrée à la boutique, je l'ai habillée et puis on a sympathisé. Je suis allée voir sa galerie Emeraude au Touquet, un bel endroit, une belle sélection, une grande sensibilité. Pat nous prend en flagrant délit de complicité!

 

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 - Guylaine Fry and me -

 

Je lui demande si elle est satisfaite de son exposition, si elle a eu du monde et si les artistes qu'elle présente ont plu. Elle semble heureuse, fatiguée, certes, mais heureuse. Martin Hollebecq, sa dernière trouvaille a remué, il faut dire que le travail de cet artiste sur la pierre est complétement stupéfiant, comme elle le dit: " Avec lui, la pierre bleue semble se plier en quatre..." A voir les oeuvres de Martin, on ne peut imaginer le long processus qui lui a permis d'aboutir à ces sculptures où la pierre apparaît tordue, inclinée, domptée, exprimant un infini lyrisme. Elle ajoute:" J'y retrouve la part d'ombre et de lumière que chacun porte intérieurement, une empreinte d'une grande sincérité et d'humanité. Celle-ci regarde, elle part demain dans un jardin, on dirait une raie, tu ne trouves pas?"

 

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- Sculptures Martin Hollebecq -

 

Je ne peux pas m'empêcher de toucher, hé,hé. Pat me dit que ça lui fait penser au cinéma de Bresson, par la pureté et par la gestuelle si caratéristique de ce metteur en scène exigeant qui sonde les âmes. Il y a de ça dans ces pierres noires-là.

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 - Chaos sensible- Martin Hollebecq -

 

Toujours un plaisir partagé que d'être fascinés par les mêmes objets. Nous avons souvent cette osmose avec Pat et ça donne à notre relation une dimension particuère et profonde, nous arrivons à communiquer au travers de ce que nous aimons et qui nous touche sans forcément avoir à en parler, on communie. Pas toujours mais quand ça nous arrive, c'est puissant. Par exemple les sculptures de Quentin Garel nous ont interpellés l'un et l'autre et en même temps. On s'est regardé et on a pas eu besoin d'en dire davantage. Pareil et pour d'autres raisons avec celles de José Vermeersch, tout autant pour les deux collages de Jacques Villeglé. Par contre l'installation de Monique Reyners l'a laissé de marbre alors que j'y ai trouvé mon compte. Une communion n'est pas une fusion mais elle permet bien des avancées l'un vers l'autre.

 

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- Scupltures Quentin Garel -

 

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- José Vermeersch -

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- Jacques Villeglé -

 

 

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- Lovely Creature - Monique Reyniers -

 

Nous avions déjà bien de quoi alimenter nos inconscients l'un et l'autre et de futures discussions qui seraient passsionnantes jusqu'à la prochaine fois. Pat, ce sert de ce qu'il voit en matière première, ça l'inspire et puis l'aspect technique compte bien plus pour lui que pour moi qui ne cherche qu'à capter ce que ces oeuvres font en moi et ceux pourquoi celle-ci plutôt qu'une autre va me percuter, me faire vibrer, me transporter, ou m'amuser, comme cette chose là de Remy Pagart ou ce tableau de Koen Scherpereel.

 

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- Remy Pagart -

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- Koen Scherpereel -

 

 Presque sur le départ, nous refaisons un tour, on sait par expérience qu'on ne voit jamais tout, c'est impossible, d'ailleurs ça n'a pas fait un pli. "Intimité", c'est le nom de sa toile, Christine Muller m'a elle aussi touchée.

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 -Toile de Christine Muller -

 

" Les visages, les corps que je peins, que je sculpte, ne sont fait que de sentiments et de ressentiments, je les caresse, je les maltraite, je les travaille... presque jusqu'à l'étouffement. Et c'est dans ce silence que mes oeuvres parlent, s'expriment, se laissent aller dans des conversations sans fin. Un face à face où le spectateur ne peut rester indifférent à ces expressions graves, tourmentées; et en même temps serienes, humbles... puis fragiles."

- Jean-Baptiste Dumont -

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 - Jean-Baptiste Dumont -

 

L'inédit est aussi au rendez-vous. Il vient de Chayan Khoï, un artiste iranien qui parcout le monde et réalise à chacun de ses voyages, sur place, ses fameux carnets où il regroupent des éléments locaux, des photos, des pliages et de la peinture.

Chayan Khoi ouvre un nouveau chemin pour la création artistique. Il lie la cybernétique et la photographie dans un art novateur qu’il appelle le « cyberéalisme ». La photographie n’est pour lui que « miroir ». Il explore les possibilités qu’offre le numérique pour nous faire pénétrer derrière le miroir, au-delà de l’image capturée par l’appareil photo, dans des mondes jusque là inaccessibles au commun. Chayan questionne l’œil du spectateur. Il le guide hors des ornières. Son art ouvre des fenêtres, établit des liens, réveille en notre imaginaire des archétypes enfouis, des mondes perdus et des structures inimaginables. L’univers du mythique, du religieux, du symbolique fait irruption dans le monde profane. Face à son œuvre, la pupille se dilate comme face à d’autres possibilités. Afin de retrouver l’universel et le cosmique, Chayan, à l’instar des mystiques indiens, abolit l’histoire et le temps. Son art veut atteindre des couches encore plus profondes que celles du conscient et même de l’inconscient personnel. (Source Lille Art Fair)

 

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- Le Globe Rêveur - Chayan Khoï -

 

Notre aventure touche à sa fin, l'heure tourne. Avant de décider de nous diriger pour de bon vers la sortie, c'est difficile, on est bien là, on tombe sur Karen Lamonte et sa robe de verre. Je caresse l'objet, je me fais réprimander, pas pu m'en empêcher. Délicieux moment.

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- Karen Lamonte -

 

Toute bonne chose a une fin, juste prêts à partir une photo nous accroche encore et puis en sortant une image me fait sourire par son actualité. C'est vrai, Dimanche prochain, on va voter! Au revoir Art Fair bénie, j'ai passé un après-midi fort en émotions, en réflexions et en partage. Hâte de voir le cru 2013 de ce voyage!

 

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© photos Hélène et Patrick Natier



15/04/2012

conviction intime

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- Sculpture Bernard Lancelle -

 

 

Je suis ce que je fais de moi.

 

 

14/04/2012

De l'écriture

 Ecrire, c’est défendre la solitude dans laquelle on se trouve ; c’est une action qui ne surgit que d’un isolement effectif, mais d’un isolement communicable, dans la mesure où, précisément, à cause de l’éloignement de toutes les choses concrètes le dévoilement de leurs relations est rendu possible.

            Mais c’est une solitude qui nécessite d’être défendue, ce qui veut dire qu’elle nécessite une justification. L’écrivain défend sa solitude en montrant ce qu’il trouve en elle et uniquement en elle.

            Mais pourquoi écrire si la parole existe ? C’est que l’immédiat, ce qui jaillit de notre spontanéité, fait partie de ces choses dont nous n’assumons pas intégralement la responsabilité parce que cela ne jaillit pas de la totalité de nous-même ; c’est une réaction toujours urgente, pressante. Nous parlons parce que quelque chose nous presse et que la pression vient du dehors, d’un piège où les circonstances prétendent nous pousser ; et la parole nous en libère. Par la parole nous nous rendons libres, libres à l’égard du moment, de la circonstance assiégeante et immédiate. Mais la parole ne nous recueille pas, pas plus qu’elle ne nous crée ; au contraire, un usage excessif de la parole produit toujours une désagrégation ; grâce à la parole nous remportons une victoire sur le moment mais bientôt nous sommes à notre tour vaincus par lui, par la succession de ceux qui vont soutenir notre attaque sans nous laisser la possibilité de répondre. C’est une victoire continuelle qui, à la fin, se transforme pour nous en déroute.

            Et c’est de cette déroute, déroute intime, humaine - non pas d’un homme en particulier mais de l’être humain, que naît l’exigence d’écrire. On écrit pour regagner du terrain sur la déroute continuelle d’avoir longuement parlé.

            La victoire ne peut se  remporter que sur le lieu de la déroute, dans les mots eux-mêmes. Ces mêmes mots auront, dans l’écriture, une fonction différente; ils ne seront pas au service du moment oppresseur ; ils ne serviront pas à nous justifier devant l’attaque du momentané, mais, partant du centre de notre être, en reconnaissance, ils iront nous défendre devant la totalité des instants, devant la totalité des circonstances, devant la vie entière.

            Il y a dans l’écriture le fait de retenir les mots, comme dans la parole il y a celui de les lâcher, de se détacher d’eux, qui peut être le fait de les laisser se détacher de nous. Au moment de l’écriture, les mots sont retenus, appropriés, assujettis au rythme, marqués au sceau de la domination humaine de celui qui ainsi les manie. Et cela, indépendamment du fait que celui qui écrit se préoccupe des mots, qu’il les choisit et les place consciemment dans un ordre rationnel connu. En dehors de ces préoccupations, il suffit d’être celui qui écrit, d’écrire  à cause de cette intime nécessité de se délivrer des mots, de l’emporter totalement sur la déroute subie, pour que cette rétention des mots ait lieu. Cette volonté de rétention se rencontre dès le début, à la racine même de l’acte d’écrire et constamment elle l’accompagne. Les mots alors entrent, précis, dans le processus d’une réconciliation de l’homme qui les lâche en les retenant, de celui qui les prononce avec une générosité pleine de mesure.

            Toute victoire humaine doit être une réconciliation, les retrouvailles d’une amitié perdue, une réaffirmation après un désastre où l’homme a été la victime ; victoire dans laquelle il ne pourrait y avoir humiliation de l’adversaire, parce qu’elle ne serait alors pas une victoire ; c’est-à-dire une manifestation de la gloire pour l’homme.

            Et c’est ainsi que l’écrivain cherche la gloire, la gloire d’une réconciliation avec les mots, anciens tyrans de sa faculté de communiquer.  C’est la victoire d’un pouvoir de communiquer. Parce que l’écrivain exerce non seulement un droit requis par une tenaillante nécessité, mais également un pouvoir, une puissance de communication qui accroît son humanité, qui porte l’humanité de l’homme jusqu’aux frontières récemment découvertes, aux frontières de l’humain, de l’être de l’homme et de l’inhumain - celles où l’écrivain arrive lorsqu’il est victorieux dans sa glorieuse entreprise de réconciliation avec les mots si souvent trompeurs. Sauver les mots de leur vanité, de leur vacuité, en les durcissant, en les forgeant durablement, c’est ce but que poursuit, même sans le savoir, celui qui véritablement écrit.

            Parce qu’il y a une manière d’écrire en parlant - lorsqu’on écrit “ comme si on parlait ” ; on doit se défier de ce “ comme si ” puisque la raison d’être de quelque chose doit être la raison d’être de cette chose et seulement de celle-là. Et faire une chose “ comme si ” elle était une autre lui enlève et lui sape tout son sens, et jette alors l’interdit sur sa nécessité.

Ecrire ce n’est ni plus ni moins que le contraire de parler ; on parle dans l’urgence d’une nécessité momentanée, et en parlant nous nous constituons prisonniers de ce que nous avons énoncé tandis que dans l’acte d’écrire résident libération et permanence - la libération ne se trouve que lorsque nous arrivons à quelque chose de permanent.

            Sauver les mots de leur instantanéité, de leur être transitoire et les conduire par notre réconciliation vers le perdurable, c’est la tâche de celui qui écrit.

            Mais les mots disent quelque chose. Qu’est ce que l’écrivain désire dire et pourquoi désire-t-il le dire ? Pourquoi et pour qui ?

            Il désire dire le secret ; ce qui ne peut se dire à haute voix à cause de la trop grande charge de vérité qu’il renferme ; les grandes vérités n’ont pas l’habitude de se dire  en parlant. La vérité de ce qui se passe dans le sein secret du temps, c’est le silence des vies, et il ne peut se dire. “ Il y a des choses qui ne peuvent se dire ”, cela est certain. Mais ce qui ne peut se dire, c’est ce  qu’il faut écrire.

            Découvrir le secret et le communiquer, ce sont les deux stimulants qui meuvent l’écrivain.

            Le secret se révèle à l’écrivain pendant qu’il l’écrit et non pas s’il le dit. La parole ne profère de secrets que dans l’extase, en dehors du temps, dans la poésie. La poésie est le secret parlé, qui exige d’être écrit pour se fixer mais non pas pour se produire. C’est avec sa voix que le poète dit le poème, le poète a toujours une voix, il chante ou il pleure son secret. Le poète parle, retient dans le dire, mesurant et créant dans le dire avec sa voix les mots. Il se délivre d’eux sans les faire taire, sans les réduire au seul monde visible, sans les effacer du son. Mais l’écrivain les grave, les fixe sans voix désormais. Et c’est parce que sa solitude est différente de celle du poète. C’est dans sa solitude que le secret se découvre à l’écrivain, non pas tout d’un coup, mais dans un devenir progressif. Il découvre le secret dans les airs et il lui faut fixer ses traits pour achever, enfin, pour embrasser la totalité de sa figure... Et ce, bien qu’il possède un schéma préalable à la réalisation ultime. Le schéma lui-même dit qu’il fallait le fixer dans une figure ; le recueillir trait après trait.

            Désir de dévoiler, désir irrépressible de communiquer le dévoilé ; double “ aiguillon” qui poursuit un homme faisant de lui un écrivain. Qu’est ce que cette double soif ? Quel être incomplet est-il celui qui produit en lui-même cette soif qui ne s’étanche qu’en écrivant ? Seulement en écrivant ? Non ; seulement dans l’acte d’écrire puisque ce que l’écrivain poursuit, est-ce l’écrit ou bien quelque chose qui s’obtient grâce à l’écrit?

            L’écrivain sort de sa solitude en communiquant le secret. Donc ce n’est plus le secret lui-même, connu de lui, qui le comble puisqu’il est nécessaire de le communiquer.. Serait-ce alors cette communication ? Si c’est elle, l’acte d’écrire est seulement un moyen et l’écrit l’instrument que l’on se forge. Mais ce qui caractérise l’instrument, c’est qu’on le forge en vue de quelque chose, et ce quelque chose est ce qui lui confère sa noblesse et sa splendeur. L’épée est noble parce qu’elle a été faite pour le combat et sa noblesse grandit si elle a été forgée avec raffinement sans que cette beauté formelle ne retire rien à sa vocation première : d’avoir été formée pour le combat.

            L’écrit est également un instrument pour cette soif inextinguible de communiquer, de “ publier ” le secret trouvé et ce qu’il a de beauté formelle ne peut lui ôter sa vocation première : produire un effet, faire que quelqu’un apprenne quelque chose.

            Un livre, tant qu’on ne le lit pas, est seulement un être en puissance, tout autant en puissance qu’une bombe qui n’a pas explosé. Et chaque livre doit avoir quelque chose d’une bombe, d’un événement qui en se produisant menace et met en évidence, bien que ce soit seulement par son tremblement, la fausseté.

            Comme quelqu’un qui lance une bombe, l’écrivain jette hors de soi, de son monde, et, par conséquent, de son atmosphère contrôlable, le secret découvert. Il ne sait pas l’effet qu’il va produire, ce qui va résulter de sa révélation et il ne peut pas non plus le dominer avec sa volonté. Mais c’est un acte de foi, comme le fait de poser une bombe ou de mettre le feu à une ville ;  c’est un acte de foi comme de lancer quelque chose dont la trajectoire n’est pas pour nous maîtrisable.

            Pur acte de foi donc que l’écriture, et même davantage, dans la mesure où le secret révélé ne cesse pas d’être secret pour celui qui le communique en l’écrivant. Le secret se montre à l’écrivain, mais ce n’est pas pour autant qu’il se rend explicable pour lui ; autrement dit, il ne cesse de demeurer un secret pour lui comme pour quiconque, et peut-être pour lui seulement puisque le sort de celui qui se heurte le premier à une vérité est de la trouver pour la montrer aux autres et que ce sont eux, ceux qui forment son public, qui en démêlent le sens.

            Acte de foi, l’écriture, et comme dès qu’il s’agit de foi, de fidélité. L’écriture demande la fidélité plus que toute autre chose. Etre fidèle à ce qui demande à sortir du silence. Une mauvaise transcription, une interférence des passions de l’écrivain détruiront la fidélité due. Et c’est ainsi qu’existe cet écrivain opaque qui interpose ses passions entre la vérité transcrite et ceux à qui il va la communiquer. 

C’est que l’écrivain n’a pas à se poser lui-même comme sujet bien que ce soit de lui-même qu’il tire ce qu’il écrit. Extraire quelque chose de soi-même est tout le contraire de se poser soi-même comme sujet. Et si le geste d’extraire de soi avec assurance fait naître l’image juste parce qu’elle est transparente à la vérité de l’écrit, poser avec une inconscience vaine ses propres passions devant la vérité, la ternit et l’obscurcit.

            Fidélité qui, pour être atteinte, exige une totale purification des passions qui doivent être réduites au silence afin de faire place à la vérité. La vérité nécessite un grand vide, un grand silence où elle puisse se loger, sans qu’aucune autre présence ne se mêle à la sienne, qui la défigurerait. Celui qui écrit, pendant qu’il le fait, doit faire taire ses passions et surtout sa vanité. La vanité est un gonflement de quelque chose qui n’est pas parvenu à être et se gonfle pour recouvrir son intériorité vide. L’écrivain vaniteux dira tout ce qu’il doit taire à cause de son défaut d’envergure, tout ce qui, faute d’exister vraiment, ne doit pas être manifeste et, pour le dire, il fera taire ce qui doit être manifesté, le fera taire ou le défigurera par son entremise vaniteuse.

            La fidélité crée en celui qui la garde, la solidité, l’intégrité de son être même. La fidélité exclut la vanité qui consiste à s’appuyer sur ce qui n’est pas, en ce qu’elle est elle-même le vrai. Et la vérité est ce qui ordonne les passions, sans leur arracher leurs racines, les fait servir, les met à leur place, la seule où elles peuvent soutenir l’édifice de la personne morale qui se forme avec elles, par l’œuvre de la fidélité à l’égard de ce qui est véritable.

            Ainsi l’être de l’homme qui écrit se forme dans cette fidélité avec laquelle il transcrit le secret qu’il publie, étant le fidèle miroir de sa figure, sans permettre à la vanité de projeter son ombre, qui la défigure.

            Parce que si l’écrivain révèle le secret, ce n’est pas par l’œuvre de sa volonté, ni par son désir d’apparaître lui, tel qu’il est (c’est-à-dire qu’il n’arrive pas à être) devant le public. C’est  qu’il existe des secrets qui exigent par eux-mêmes d’être révélés, publiés.

            Ce qui se publie l’est pour quelque chose, pour que quelqu’un d’unique ou au contraire un nombre élevé de personnes, parce qu’ils l’ont su, vivent en le connaissant, pour qu’ils vivent d’une autre façon après l’avoir appris ; pour libérer quelqu’un de la prison du mensonge ou du brouillard de l’ennui qui est un mensonge vital. Mais on ne peut peut-être pas parvenir à ce résultat s’il est désiré pour lui-même, par philanthropie. Seul libère celui qui, indépendamment du fait qu’il le prétende ou non, a le pouvoir de le faire, mais en revanche si l’on n’a pas ce pouvoir, il ne sert à rien de le prétendre. Il y a un amour impuissant qui s’appelle philanthropie. “ Sans la charité, la foi qui transporte les montagnes ne sert à rien ” disait St Paul ; mais aussi : “ La charité est l’amour de Dieu ”.

            Sans la foi, la charité se réduit à un impuissant désir de libérer nos semblables d’une prison dont nous ne pressentons même pas la sortie, à l’issue de laquelle nous ne croyons même pas.

            Seul donne la liberté celui qui est libre. “ La vérité vous rendra libres ” . La vérité, obtenue par le biais de la fidélité purificatrice de l’homme qui écrit.

            Il est des secrets qui demandent à être publiés et ce sont eux qui visitent l’écrivain, profitant de sa solitude, de son isolement effectif qui lui fait éprouver la soif. Un être assoiffé et solitaire, c’est ce dont a besoin le secret pour se poser sur lui, lui demandant, puisqu’il lui donne progressivement sa présence, qu’il le fixe par la parole en traits permanents.

            Solitaire à l’égard de lui-même et des hommes mais aussi des choses puisque ce n’est que dans la solitude que s’éprouve la soif de vérité que comble la vie humaine. Soif également de rachat par une victoire sur les mots qui nous ont échappé en nous trahissant. Soif de vaincre par la parole les instants vides qui ont fui, cet échec incessant de nous laisser aller selon le temps.

            Dans cette solitude assoiffée, la vérité - même occultée - apparaît, et c’est elle, elle-même qui demande à être manifestée. Qui l’a vue progressivement apparaître, ne la connaît pas s’il ne l’a pas écrite, et il l’écrit pour que les autres la connaissent. C’est qu’en réalité, si elle se montre à lui, ce n’est pas à lui en tant qu’individu déterminé mais en tant qu’individu du même genre que ceux qui doivent la connaître ; et elle se montre à lui, profitant de sa solitude et de son désir, du silence dans le vacarme de ses passions.  Mais ce n’est pas à lui, à proprement parler, qu’elle se montre puisque si l’écrivain connaît selon qu’il écrit, et qu’il écrit pour communiquer aux autres le secret découvert, ce à quoi elle se montre en vérité c’est à cette communication, cette communauté spirituelle que forment l’écrivain et son public.

            Et cette communication de l’occulte qui se fait à tous grâce à l’écrivain, c’est la gloire, la gloire qui est la manifestation de la vérité cachée jusqu’à présent, qui dilatera les instants en transfigurant les vies. C’est la gloire que l’écrivain espère même s’il ne le dit pas et qu’il atteint lorsque, écoutant plein de foi dans sa solitude assoiffée, il sait transcrire fidèlement le secret dévoilé. Gloire dont il est le sujet récipiendaire après ce martyr actif qui consiste à poursuivre, capturer et retenir les mots pour les ajuster à la vérité. Grâce à cette traque héroïque la gloire rejaillit sur la personne de l’écrivain, elle se reflète sur lui. Mais la gloire est, en réalité, celle de tous ; elle se manifeste dans la communauté spirituelle que forment l’écrivain et son public et elle la traverse.

            La communauté de l’écrivain et de son public, contrairement à ce que de prime abord l’on croit, ne se forme pas après que le public a lu l’œuvre publiée, mais avant, dans l’acte même par lequel l’écrivain écrit son œuvre. C’est alors, en rendant  le secret patent, que se crée cette communauté de l’écrivain et de son public. Le public existe avant que l’œuvre ait été ou non lue, il existe depuis le commencement de l’œuvre, il coexiste avec elle et avec l’écrivain en tant que tel. Et seules parviennent à avoir un public dans la réalité les œuvres qui l’avaient depuis le début. Et ainsi l’écrivain n’a pas à se poser la question de l’existence de ce public puisqu’il existe avec lui dès qu’il commence à écrire.

            Et  cela c’est sa gloire qui toujours arrive en répondant à celui qui ne l’a pas cherchée ni désirée, bien qu’il la propose et l’espère pour transmuer avec elle la multiplicité du temps, consommé, perdu, grâce à un seul instant - unique, compact et éternel.

                                                           

 

  - Maria ZAMBRANO -

Hacia un saber sobre el alma © Alianza Editorial 2000

(traduction Jean-Marc Sourdillon, revue par Jean-Maurice Teurlay)


 

12/04/2012

On se découvre face à l'adversité.

Son premier mail m'a déroutée. Faut bien dire que je n'ai  pas particulièrement de relation avec Jean si ce n'est au travers de Christian et que c'est la première fois que je reçois un mail directement de lui. Pourtant, j'en garde un souvenir diffus quand je l'ai eu au téléphone parce qu'inquiète d'être sans nouvelles de Christian qui ne me donnait plus signe de vie d'un coup d'un seul presque au milieu d'une phrase et que ça ne lui ressemblait guère. A cette époque lointaine, je n'avais pas les moyens de joindre Christian directement, et, sachant que Jean Barbe était son ami, je me suis tournée vers lui, seul à être dans l'annuaire international. Une brève rencontre ponctuée de pleurs d'enfants, il a été chaleureux et disponible, me rassurant d'un "Je vais aux nouvelles, je vous reviens!".

C'était un autre temps. Celui où l'un comptait sur l'autre et savait possible et incontournable la disponibilité de l'un à l'autre comme dans toute amitié qui se respecte. Du moins dans l'idée que je me fais de toute amitié qui se respecte.
 
Aujourd'hui, c'est la guerre! Une guerre de tranchée, injustifiée.
C'est difficile d'entendre un ami qui ne pense pas comme toi et qui t'alerte sur le chemin que tu prends de son point de vue. Un guerrier qui n'aime pas un opportuniste, ça tombe sous le sens, c'est même une chance d'avoir en face de soi quelqu'un qui met son exigence à ton service.
Faut être bien démuni ou trop rageux pour m'écrire et me demander implicitement de rendre la raison à Mistral! Faut être ignorant des choses de la vie ou feindre de les ignorer pour autrui, faut pas penser qu'une amitié existe, qu'elle compte, qu'elle a pour ses protagonistes une valeur sacrée, faut être dans une autre réalité. Le premier message de Jean m'a remuée:
 
Il et devenu fou. Il me menace. La fille dont il parle est mon amoureuse.Elle va publier dans une autre maison que celle où je travaille. 
Il est tellement coké, il me fait des menaces.

Ah! Mais de qui il parle là! Spontanément, j'ai répondu à ce message de cette manière chez Christian, et, encore, par chance, Christian avait devancé Jean qui l'avait menacé de m'écrire, faut dire, on est en plein délire!
Christian est mon ami, il est plus qu'un ami pour moi. Ce qui nous unit ne regarde que nous mais je crois pouvoir dire qu'il ferait pour moi ce que je fais pour lui, que nous comptons l'un sur l'autre, que nous nous épaulons, que nous nous inspirons, que nous nous motivons, que nous nous épanouissons. Il faut du temps pour qu'une telle relation s'installe, faut apprendre à se connaître, nous ne sommes parfaits ni l'un ni l'autre mais nous tendons à devenir meilleurs en nous ouvrant l'un à l'autre, n'est-ce -pas là la signification même de l'amitié?
Jean et Christian sont amis, de longue date. Ils ont du en voir et en endurer ensemble, ils ont du certainement s'épauler, se détester, se revenir. Alors pourquoi faut-il que d'un seul coup l'un se présente en victime et pointe d'un doigt accusateur l'autre en disant qu'il devient fou? "Quand tu veux tuer ton chien, tu dis qu'il a la rage." Quel est donc le dessein de Jean Barbe?
Après m'être exprimée sur le Vacuum en réponse à ce mail, j'ai cru m'être fait comprendre, n'avais-je pas été claire? Non, ça n'a pas suffit, j'ai reçu un deuxième message, différent, plus agressif me concernant:
 
Bravo, vous êtes bien manipulée.
Et totalement à côté de vos pompes.
Traîner une femme dans la boue, c'est votre idée de la littérature?
Adieu Madame.

Ouch, et vas-y que je t'envoie mon skud. J'ai demandé ce qu'il tentait de me dire, moi traîner une femme dans la boue! Et puis j'ai réfléchi, j'ai dormi dessus comme on dit chez nous, je n'ai pas apprécié ce jugement à l'emporte pièce, même quelqu'un qui n'a pas un ego démesuré en a un, et pourquoi allais-je le laisser ainsi penser que j'étais manipulée comme si Mistral était un gourou, que j'en avais peur ou que sais-je, comme si Mistral était intouchable et que j'étais une sorte de beni-oui-oui, comme si la relation entre Christian et moi n'avait aucune valeur, presque à deux doigts de me dire que j'étais cinglée et que je n'ai pas toute ma raison, mon père me l'a dit, ma mère aussi et maintenant ce Monsieur que je ne connais pas et pour qui je n'avais jusqu'ici que de l'estime, les amis de mes amis étant mes amis! Fichtre! 
 
Jean,
Vous ne me comprenez pas, vous ne me connaissez pas à vous lire. A quoi tentez-vous d'aboutir? Pourquoi cette diabolisation? Pourquoi cette tentative d'humiliation à mon égard? Pourquoi vous en prendre ainsi à moi parce que j'aime Christian? Pourquoi l'amour que je lui porte vous pousse à croire que je suis stupide? Ignorez-vous à ce point quel homme généreux il est, vous, son vieil ami? Ignorez-vous à quel point sa lucidité fait mouche et que c'est sans doute ça qui vous touche? Que craignez-vous pour que votre peur vous aveugle à ce point?
Je l'ignore, mais je vous plains.
Vous savez tout comme moi que toute communication est manipulation et c'est le coeur du différend qui vous séparent, vous savez tout comme moi que je suis loin d'avoir les pieds en dehors des sabots, que je suis une femme posée, lucide, entière, consciente, que je n'agis que rarement sous la colère, et vous devriez savoir que j'ai une haute idée de la littérature et de la valeur des mots et que je mesure les miens en vous écrivant, et qu'enfin je n'ai jamais traîné de femme dans la boue et que je serais la première à sortir les griffes si cela devait se produire. Il y a pour moi une différence notable entre se défendre et agresser. On ne s'adresse pas à un fauve comme à un mouton, on ne peut attendre d'un loup d'être un chihuahua ni d'un serpent d'être une limace. Question de caractère, question de relation, question d'idée qu'on se fait des uns des autres. Si on veut vivre paisible dans sa petite vie tranquille avec ses petits travers à pouvoir agir en toute impunité comme bon nous semble alors on n'a pas dans son carnet d'adresse en pole position Christian Mistral en ami et en agitateur de conscience. J'ai la mienne, elle me sied, parfois elle me fait souffrir aussi. Au fond je devrais vous dire merci, quel meilleur moment pour revendiquer mon amitié sans faille pour Christian?
A vous lire, Monsieur.

Tout ceci pourrait paraître ridicule et puéril mais ne l'est point. Il est question de la dignité d'un homme, de son intégrité, de sa valeur.
La demoiselle chère au coeur de Barbe a bien cherché la bête en insultant le travail de Christian, en discréditant son oeuvre, son écriture le disant has-been et au bout de son art! Encore une affirmation non fondée, a-t-elle au moins lu toute l'oeuvre de Mistral qui emmène à bout de souffle, ciselée, précise et percutante? A-t-elle la moindre idée de ce qui anime cet homme, de sa capacité réflexive, de son implication dans la création littéraire, de sa force  et de sa générosité? Qu'attend donc de moi, my god, un Jean Barbe, droit dans ses bottes, s'attribuant avec panache un combat qui n'est pas le sien pour plaire à sa belle plutôt que de donner une tribune à tous ces jeunes qui auraient tant à dire et qu'on aimerait entendre davantage? Sigh. Pour ma part, il peut bien faire ce qu'il veut de sa vie, il peut bien défendre les valeurs qu'il souhaite tant qu'elles ne viennent pas empiéter sur les miennes. 
Comment peut-on prétendre défendre plus de justice, plus d'éducation et plus d'avenir en employant des méthodes humiliantes et en agitant les vieux démons et les vieilles histoires comme ceux qui tirent sur les ambulances? Québécoise de coeur, je défends comme je peux une valeur qui m'est chère et qui fait partie de celle que je transmets chaque jour à mes enfants: la fidélité. La fidélité à celle ou à celui qu'on est, la fidélité à l'intégrité, à ce pourquoi on se bat et la fidélité à ceux qu'on aime, à l'amitié, à la fraternité et à la liberté, à laquelle on aspire, tous, autant que nous sommes.
 
LB
 

11/04/2012

Au commencement était la mode.

 

10/04/2012

19:25

Je viens de croiser cette pensée au hasard de mes pérégrinations googlesques, elle me percute, je la partage:

 

"On va toujours trop loin pour les gens qui vont nulle part."

- Pierre Falardeau -

 

Palindrome

Les semaines se suivent et, ont parfois des similitudes. Dimanche dernier autour d'un poulet-frites, on revoyait le dictionnaire et ses nouveaux mots annuels, hier soir pour l'anniversaire de mon petit dernier nous nous sommes organisés de nouveau un bref cours de français. Nous n'étions pourtant qu'à l'apéritif, tranquillement tous les sept à siroter notre élégante coupe de champagne et grignotant des petites saucisses aux herbes fumantes. J'avais, entre une paire de baskets, un jean brut et un livre de poésie visuelle absolument étonnant d'un jeune artiste japonais, offert à Peter un chatoyant recueil d'anagrammes. Nous voilà donc partis sur le sujet, évoquant celle qui m'avait délicieusement chatouillé l'oreille concernant Marie de Tourvel. La chérie de mon cadet étudiante à la faculté de lettres, elle veut être institutrice, en a profité pour nous en faire découvrir quelques autres et nous questionner sur ces mots ou ces phrases qui se lisent de la même manière de gauche à droite que de droite à gauche. "Voyons, comment cela s'appelle-t-il? Je ne me souviens plus? On en a pourtant parlé à Noël dernier?". "Noyon", rétorque Pat. " Oui, noyon en est un..." Re-Google, re les téléphones portables, et une minute aprés à peine, la réponse tombait: Palindrome! Ressasser, engage le jeu que je le gagne, Esope reste ici et se repose, élu par cette crapule, hé,hé, tous les moments sont bons pour apprendre ou se rafraîchir la mémoire. On n'est pas au bout de nos peines avec la langue française!

 

15:15

Je sors de mon bain avec cette pensée fixe: pourquoi diable dit-on que ça rend sourd? 

 

On ne badine pas avec l'amour.

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"Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux et lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées ; le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c'est l'union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux ; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière ; et on se dit : “ J'ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j'ai aimé. C'est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui."

- Alfred de Musset -