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05/04/2012

Le Dialogue entre André Villers et Picasso

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- André Villers - Autoportrait -

 

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- Picasso par André Villers -


Mon pylône mon patron mon pilote mon explorateur

Tu as pris de la peinture du papier du charbon de la ficelle et des clous

Y as mêlé de la tôle de la glaise et de la colle

L'as fait cuire avec du ciment de la terre de l'osier des feuilles et du plâtre

Et tu en as fabriqué des pichets des verres des bouteilles des chaises et des guitares

 

Mon elfe mon apprenti mon navigateur mon géographe

A travers les chaumes et les plages les vagues et les horizons

Les nuages les pluies les épines les écorces et les falaises

Les nervures les duvets et les coquilles les vignes et les racines

Tu révéleras fixeras l'heure et le sourire

 

Mon minotaure mon Barbe-bleue mon labyrinthe ma spirale

Tu as pris de la peinture des pichets du papier des verres du charbon et des bouteilles

Et tu en as fabriqué des chevaux des taureaux des coqs des chèvres des colombes et des hiboux

Du ciel de la mer des arbres des chevelures des visages et des femmes

Cherchant depuis toujours à trouver sans chercher et trouvant toujours

 

Mon Thésée mon chat botté mon belvédère mon rayon

A travers les rideaux et les draps les nappes et les vêtements

Les jouets les meubles et les cendriers les miroirs et les bouquets

Les toits la poussière et la fumée les murs et les caves

Tu réveilleras multiplieras le jour et la nuit

 

Mon berger mon silhouetteur mon éclat mon atelier

Tu as tordu des pichets des bouteilles des guitares des taureaux et des chèvres

Les a pressés avec du ciel des arbres des visages des journaux et des livres

Les as imprégnés de musées de musiques d'histoires de cirques et de lampes à pétroles

Et tu en as extrait du sang du voyage de la cendre des fenêtres et de la fureur

 

Mon dompteur mon remplisseur mon gong mon laboratoire

A travers le riz la farine le sucre et le pain

La vapeur l'huile et le vinaigre le sel et le safran

Les bruits les cuillers et couteaux moulins et parfums

Tu mijoteras sublimeras la soif et la faim

 

Mon roc mon port mon phare mon château

Tu as pris des pichets du sang des bouteilles du voyage des guitares et de la cendre

Et tu en as extrait des cornes du soulèvement du silence de la panique des mâchoires et des outils

Des balbutiements des larmes des agonies des charognes des putréfactions et des songes

Perdu depuis toujours dans la mêlée des villes et grattant toujours

 

Mon tourbillon mon navire mon sémaphore mon observatoire

A travers filtres et sabliers soufflets et pinceaux

Les plis les déchirures et les brûlures les superpositions et les reflets

Les éblouissements les cadres et les caches la patience et l'éclair

Tu guériras embaumeras la guerre et la paix

 

Mon olivier ma locomotive mon souvenir mon rempart

Tu as sucé du sang de la fureur du soulèvement et de la panique

Les as recrachés à travers des balbutiements des agonies des putréfactions des songes des mensonges et des sciences

Tu y as fait macérer des aegipans des gladiateurs des centaures et des peintres

Et tu en as isolé de la douceur perdue de la découverte et du rire

 

Mon bourgeon ma vigie mon illumination mon souterrain

A travers les encres et les phrases les cartes et les images

Les cris les explications et les interrogations les sous-entendus et les ironies

Les interprétations les points et les blancs les prémonitions et les nostalgies

Tu découvriras transmettras le silence et le paradis

 

Mon alphabet mon monument ma résistance mon rameau d'or

Tu as pris du sang de la douceur perdue de la fureur de la découverte du soulèvement et du rire

Et tu en as isolé des cris des chants de la respiration du sommeil du réveil et des coups de chance

Du tonnerre de l'éruption de la fermentation de la germination de la floraison et des astres

Creusant depuis toujours dans le malheur du monde et le refusant toujours

 

Ma voix ma braise ma patience ma grappe de mercure

A travers le souffle et la salive les lèvres et les articulations

La peau les doigts et les yeux les plaintes et les caresses

La palpitation la souffrance et la fraîcheur la tendresse et la buée

Tu apprivoiseras déchiffreras l'angoisse et le délice

 

Mon oracle mon foyer mon élocution ma main

Mon empereur des masques tu as revêtu les insultes les ricanements la sottise et la solitude à toute épreuve

Et tu en as distillé les baisers de l'enfance l'alcool de survie le baume des foules

Tu en as délivré le ventre et les yeux questionné les beautés exclues

Né de cette interrogation depuis toujours et mort naissant toujours

 

Ma perspective mon hublot ma lecture ma paupière

Prince de l'instant alchimiste des ténèbres rouges

A travers geôles bûchers hopitaux charniers et camps

Refus et fièvres colères et suintements calculs et astuces

Tu libéreras transperceras le pourrissement de notre univers 


- Michel Butor -


04/04/2012

maintenant

J'en ai marre de lutter, en sous-entendu, l'important est d'oeuvrer, le reste est superflu.

 

De ses doigts de peau, toucher la peau des choses...

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- René Magritte -

 

" Le peintre, du bout des doigts, caresse ou attaque la toile, l'écrivain scarifie ou marque le papier, appuie sur lui, le presse, moment où le regard se perd, le nez dessus, vue annulée par le contact: deux aveugles qui ne voient que par la canne ou le bâton. L'artiste ou l'artisan, par la brosse ou le pinceau, par le marteau ou la plume, à l'instant décisif, se livre à un peau à peau. Nul n'a jamais pétri, n'a jamais lutté, s'il a refusé la prise de contact, nul n'a jamais aimé ni connu."

- Michel Serres -

 

02/04/2012

la salle des mots

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- Cécile Rouquié -

 

 

01/04/2012

1500 nouveaux mots dans le dico

Nous étions tous réunis une fois de plus autour de la table ovale nappée de lin bistre de notre salle à manger, nous fêtions aujourd"hui les 28 ans de la douce de mon fils aîné. Toujours une belle occasion de montrer à quel point l'amour circule dans cette maison. Pat a fait le poulet, Ed a préféré les frites pour son aimée, la purée c'est pas trop sa tasse de thé, c'est drôle les mots, les expressions... On a parlé de choses et d'autres, on a parlé de livres, de littérature, d'écriture, de mots. J'ai osé au moment du dessert un mot impromptu un peu enivrée par la chaleur humaine doublée de celle du vin. La tarte aux pommes était un peu molle, Pat annonce qu'il a fait l'erreur de la couvrir pour qu'elle reste chaude en la sortant du four. Là, je lui envoir un: " Pour la chaudeur, suffit que tu la laisses à l'intérieur!". Là Peter qui excelle et se gourmandise des mots me dit: " Maman, c'est quoi ce nouveau mot complétement pas possible?", je lui rétorque que je ne sais pas comment il m'est venu mais que voià il répond pour moi à cette notion de maintenir au chaud. " Ah! Tu fais comme Sarko qui après Ségolène invente des nouveaux mots!". Merde, j'ignorais que Nicolas avait créé un mot: "méprisance" que je trouve pour ma part plutôt joli. La conversation s'envole et fait feu de tout bois, voilà mes gars tous les trois avec leurs téléphones portables googlant je ne sais quoi. Là d'un coup Ed. interpelle l'assemblée: " Non, mais vous vous rendez compte, 1500 nouveaux mots dans le dictionnaire 2012! ", là dessus Peter intervient en disant: " Si facebooker entre dans le dictionnaire, je me pends!" Il hait, il déteste facebook, il déteste twitter, tous les trois en reviennent d'ailleurs. "Maman, on peut pas aimer les mots et laisser faire ça!". Non, on peut pas. Ed nous sort la liste des dix nouveaux mots les plus sollicités: cougar, twitt, vuvuzela ( quel boucan pourtant que cet engin là), cagole ( je connaissais pas, j'ignorais complètement ce mot qui désigne une femme provocante et vulgaire), E-learning (sans commentaire), cacou ( mot que j'ai toujours employé depuis plus de vingt longues années), smartphone, bisphénol, caïpirinha. "Caïpirinha!". Ce mot les a mis en émoi. Du coup les voilà tous les trois partis vers les nouveaux mots de 2010 et de nouveau s'étonner: geek, adulescent, chimie verte, réseauter... Quoi, une langue, c'est une langue vivante, normal qu'elle évolue, qu'elle s'enrichisse, qu'elle perde en route de l'inusité. "Vous savez ce qu'est l'alacrité?". Je les aime tous autant qu'ils sont les uns et les autres, ils m'éclatent et font ma fierté. Ils font mon bonheur ces gars là sans le savoir, quand un me cite Molière au petit déjeuner, ou l'autre me parle des Fleurs du Mal de Baudelaire, ou le troisième qui me disait encore il y a à peine deux heures à l'apéro: " Un livre ne remplace pas un film, un livre ça nous emporte bien davantage, on s'en fait des dizaines de films en ne lisant qu'un seul livre, moi le héros d'Harry Potter, Harry, je le voyais roux." Ouf, mille cinq cent mots nouveaux dans le dico, si ça permet d'ouvrir encore le champ d'investigation de nos cerveaux, c'est une bonne nouvelle. Chouette, la relève est assurée.

 

30/03/2012

de passage

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- Photo Laurence Guez -

 

" - Oui. On nous oubliera. C'est la vie, rien à faire. Ce qui aujourd'hui nous paraît important, grave, lourd de conséquences, eh bien, il viendra un moment où tout sera oublié, où cela n'aura plus d'importance. Et, c'est curieux, nous ne pouvons savoir aujourd'hui ce qui sera un jour considéré comme grand et important, ou médiocre et ridicule.(...) Il se peut aussi que cette vie d'aujourd'hui dont nous prenons notre parti, soit un jour considérée comme étrange, inconfortable, sans intelligence, insuffisamment pure et, qui sait, même, coupable."

- Anton Tchekov -

 

26/03/2012

Réjouissance

 

 

" La plus constante marque de sagesse, c'est une constante réjouissance."

- Michel Eyquem de Montaigne -

 

 

C'est le printemps!

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Aujourd'hui encore, il fait un temps superbe. Le printemps s'annonce prématuré et violent, déjà les bourgeons précoces surgissent sur les quelques bonsaïs du patio, tout invite à la douceur de vivre. Je petit déjeune, tard, avec mon fils aîné. Le changement d'heure, hier nous a tous un peu perturbés. Il soupire, souffle, dit qu'il est fatigué. Je suis à peu de choses près dans le même état, je lui avoue que moi aussi je sens le poids de la vie, malgré tout j'ajoute que pourtant on a une bien belle vie si on s'évertue à penser à celles d'autres humains ailleurs sur la planète et parfois même pas si loin. Un cadre doux et enveloppant, de l'amour, de l'espoir, de quoi se nourrir, se vêtir, s'instruire. S'amuser aussi, réfléchir, inventer. Pourquoi faut-il toujours qu'on ne soit pas satisfait et qu'on aspire à ailleurs, à autrement, à autre chose?

C'est sans doute notre lot, à nous autres êtres humains nantis, de vouloir toujours plus, de vouloir explorer d'autres pistes, de vouloir avoir le don d'ubiquité, de voir son temps décupler et sa vie plus intense encore, plus riche, plus incroyable. Ma mère me disait souvent: " Se contenter de ce que l'on a, c'est être riche."  Parfois j'adhère à cette idée, elle me réconforte et me rassérène, d'autre fois comme aujourd'hui elle me hérisse et me donne envie de tout envoyer ballader. Non, comment pourrais-je me contenter de ce que j'ai? Non que je veuille davantage, mais je veux autrement, je veux sentir mon coeur brûler comme un ciel d'orage, je veux que le sang qui circule tranquillement dans mes veines devienne bouillonant, je veux être bousculée par la passion, grisée par le tournis de mes neurones, je veux être emportée au-delà, que mon corps exulte et que de mon coeur jaillissent des cris de plaisir à n'en plus finir, je veux jouir. Jouir!

C'est ce fichu printemps qui sans doute me perturbe, la montée de sève, la peur de vieillir, de mourir avant que d'avoir accompli, que sais-je? Ou alors c'est dans ma composition intime, ce besoin est mon carburant, ce récurent besoin me rend infatiguable, me donne l'énergie pour aller de l'avant, pour construire, imaginer, m'offrir à la vie en permanence, ne pas m'arrêter sur mes acquis, toujours me remettre à l'ouvrage, me ré-inventer, explorer. Je n'ai pas à avoir honte d'être insatisfaite, je n'ai pas à me tourmenter de vouloir encore plus, de vouloir davantage ressentir, de vouloir davantage exprimer, de vouloir davantage encore aimer et l'être. Ah, être aimée, tout partout, toute entière, adorée.

Est-ce normal de vouoir vivre intensément? Je ris dans mes moustaches de cette question stupide. Normal? Qu'est-ce que nourmal veut dire? Si tu le vis, bougresse, c'est que c'est normal. Quand vas-tu accepter d'être ce que tu es sans détour, quand vas-tu comprendre que tu n'as pas d'autres choix que de vivre ce que tu as à vivre, que tu ne peux pas influer sur ce que tu ressens, que tu ne peux qu'en prendre acte, en prendre conscience et au mieux en faire de l'or, au pire en rester au plomb. Que ta vie est ta vie, que tu en es l'actrice, la scénariste, la metteur en scéne!

Demain, je retourne à l'hôpital sur le billard me faire enlever les quatres broches qui endolorissent mon poignet droit depuis plus de sept semaines, j'ai hâte d'être libérée et de récupérer sereine ma main gonflée comme une outre pleine. L'expérimentation d'en perdre l'usage a été source de colères, d'angoisses mais d'étonnements aussi. J'ai découvert qu'une main gauche n'est pas aussi gauche qu'on le dit, j'ai été surprise par le flot d'empathie que j'ai pu recevoir, j'ai testé ma capacité à m'adapter, à lâcher prise, à inventer d'autres façons de faire, à m'ouvrir. Rien ne remplace l'empirisme. Penser aimer, c'est bon. Aimer c'est encore meilleur. Penser créer, c'est bon. Créer, un degré au-dessus. Penser écrire c'est bon. Ecrire c'est jouissif. Penser jouir c'est bon, mais jouir. Ah jouir! 

Pas à tergiverser, le printemps est vraiment là. Il n'a plus qu'à s'installer. Je t'aime, tu sais.

 

25/03/2012

"Il nous reste à inventer d'inimaginables nouvelles idées"

 

"Oui, depuis quelques décennies je vois que nous vivons une période comparable à l'aurore de la Paideia, après que les Grecs apprirent à écrire et démontrer ; semblable à la Renaissance qui vit naître l'impression et le règne du livre apparaître ; période incomparable pourtant, puisqu'en même temps que ces techniques mutent, le corps se métamorphose, changent la naissance et la mort, la souffrance et la guérison, les métiers, l'espace, l'habitat, l'être-au-monde...

Face à ces mutations, sans doute convient-il d'inventer d'inimaginables nouveautés, hors les cadres désuets qui formatent encore nos conduites, nos médias, nos projets adaptés à la société du spectacle. Je vois nos institutionsluire d'un éclat semblable à celui des constellations dont les astronomes nous apprirent qu'elles étaient mortes depuis longtemps déjà...

Je voudrais avoir dix-huit ans, l'âge de Petite Poucette et de Petit Poucet, puisque tout est à refaire, puisque tout reste à inventer. Je souhaite que la vie me laisse assez de temps pour y travailler encore, en compagnie de ces Petits, auxquels j'ai voué ma vie, parce que je les ai toujours respectueusement aimés."

 

- Michel Serres -

 

 

Joan Mitchell

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" Peindre c'est une manière de se sentir vivre."

- Joan Mitchell -

 

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" Sentir, exister vivre, je pense que c'est la même chose, mais la qualité n'est pas la même. Exister, c'est la survie, cela ne veut pas nécessairement dire sentir. Vous pouvez dire bonjour et bonsoir. Sentir, c'est quelque chose de plus, ce n'est pas simplement survivre."

- Joan Mitchell -

 

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Joan Mitchell est née en 1925 à Chicago. Elevée par sa famille fortunée, son père était un médecin célèbre, elle se tourna très vite vers les arts. En 1942, elle s'inscrivit au Smith College qu'elle quitta en 1944 pour le Art Institute of Chicago. Elle y reçut son diplôme (Bachelor of Arts degree) en 1947 et un autre diplôme (Master of Fine Arts) en 1950. Elle étudia aussi à l'école de Hans Hofmann à New York et voyagea en France, Espagne et en Italie. Dans les années 1950, elle était considérée comme un élément essentiel de l'École de New-York.

Son travail a été influencé à ses débuts par Vincent Van Gogh, Paul Cézanne, Wassily Kandinsky, puis par Franz Kline et Willem de Kooning, entre autres.

En 1955 Joan Mitchell s'installa en France pour rejoindre son compagnon le peintre canadien Jean-Paul Riopelle, avec lequel elle eut une relation longue, riche et tumultueuse. Ils n'habitèrent pas ensemble et conservèrent des ateliers séparés, mais dinaient et buvaient ensemble tous les jours. Ils habitèrent d'abord Paris, avant de déménager à Vétheuil, un village du bord de la Seine près de Mantes-la-Jolie dans la maison où vécut Claude Monet avant de s'installer à Giverny.

Elle mourut à Vétheuil en 1992.

Les œuvres de Joan Mitchell sont souvent de grandes dimensions, couvrant deux panneaux. Ses tableaux sont très expressifs et émouvants.

(Source Wiki)

 

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" Je veux simplement faire qu'une surface fonctionne. c'est juste une utilisation de l'espace et de la forme, une ambivalence des formes et de l'espace. Le style en peinture a à voir avec les étiquettes. beaucoup de peintres sont obsédés par la volonté d'inventer quelque chose. Tout ce que je voulais, c'était peindre. j'avais une telle admiration pour les grands peintres. Si tu étudies de près un Matisse, la manière dont la peinture est poséee et la manière dont le blanc est mis. Moi, je voulais poser la peinture comme Matisse. J'y ai travaillé dur il y a très longtemps."

- Joan Mitchell -

 

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24/03/2012

complicité, confiance, compréhension

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- Photo Laurence Guez -

 

 

"La grande différence entre l'amour et l'amitié, c'est qu'il ne peut y avoir d'amitié sans réciprocité."

- Michel Tournier -

 

 

23/03/2012

s'enrichir

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" Apprendre, c'est déposer de l'or dans la banque de son esprit."

- Shad Helmstetter -

 

l'éducation est un droit non un luxe

 

C'est si bon d'être mère!

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- Photo Laurence Guez -

 

Tout est là. Tout peut se dire en si peu de mot. L'amour est au-delà des phrases, il se vit intense et sans retenue...

  

pas le moment de rester une bande de vieux cons...

 

Faut se remuer les fesses pour la génération en place, faut leur donner ce qu'on a pas reçu, pas forcément, faut leur donner nos bras pour ouvrir leurs espaces, faut être là, vivants, remuants, engagés, présents, et tonitruants. Faut réveiller en nous notre jeunesse latente, faut revendiquer et soutenir, cette manière pour nous d'avoir encore vingt ans! Jesus, tous ces jeunes qui ont tout entre leurs mains, on aurait tellement à leur dire... Nous les durs à cuire... Eux tellement à agir! Faut le faire, faut mettre en commun nos savoir faire et leurs devenirs, what else? Tout est dans cette équation, bougeons-nous, agissons. Soyons, ouverts!

  

22/03/2012

l'à-venir

 

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- Kasimir Malevitch -

  

On a tous à apprendre de la jeunesse, elle se bat au Quebec pour son éducation et partout elle se bat pour peu qu'on l'écoute. C'est normal, c'est le propre de la jeunesse de se faire entendre. Elle est notre devenir. Je l'aime.

" Il nous reste à inventer d'inimaginables nouvelles idées." - Michel Serres -

Ces hommes et ces femmes sont l'avenir, on ne peut que les soutenir. 

Carré rouge.

 

 

21/03/2012

Arrêt sur image

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- Photo Laurence Guez -

 

Il y a toujours de la magie dans les photos de mon amie Laurence, elle arrive toujours à voir et à capter les instants d'une vie ou d'une soirée avec une grâce et une personnalité qui lui sont propres. Une fois de plus elle m'a troublée. En voyant cette photo ce matin sur son blog, j'ai été touchée par la beauté de l'image que j'ai d'abord prise pour un montage, car en fait après en avoir parlé avec elle j'ai compris qu'il s'agissait surtout d'un effet de miroir, faut quand même avoir l'oeil! mais surtout, j'ai pu revivre ce moment tout simple et si émouvant du milieu de cette soirée familiale, amicale et bon enfant. J'étais en pleine discussion avec un monsieur charmant que je ne connaissais que depuis quelques heures, sa femme est une bonne cliente, nous étions tous les deux plongés dans le livre de pensées africaines qui distille chaque jour sur le comptoir une nouvelle phrase souvent tellement pleine de bon sens. Je lui parlais de celle que je préfère: "On entend l'arbre qui tombe pas la forêt qui pousse" et lui me racontait en retour son amour pour ce continent. Chouette et délicieux souvenir, merci à elle de me l'avoir ainsi immortalisé.

 

19/03/2012

Geneviève

Je n’avais pas vu Geneviève depuis quatre ans. Avant cette date dingue où tout mon monde s’est écroulé je lui étais fidèle. Je passais souvent la voir dans sa petite échoppe. Un vrai capharnaüm que son petit espace ouvert aux vêtements pour femme de deuxième main, un dépôt-vente où par un insondable mystère se retrouvaient beaucoup de pièces venant de chez moi, à croire que je ne faisais pas bien mon travail pour que la vie d’un habit soit aussi éphémère. Bon, faut bien dire qu’après une enquête assidue de ma part, j’avais compris que c’étaient toujours les mêmes femmes qui se dépossédaient très vite de leurs fringues, pour certaines ça n’est qu’un consommable, une manière aussi de juguler leurs angoisses existentielles, d’emplir leur temps et leur agenda troué par une solitude sociale qui dépasse l’entendement. Acheter des vêtements ça peut être emplir un vide et se donner l’illusion l’espace d’un instant d’être là, d’habiter son corps, de s’occuper de soi, d’agir, d’exister.
 
Geneviève m’a toujours fascinée, une gouaille à la Juliette Gréco, un look seventies, ardente féministe, lumineuse anarchiste, elle était toujours la première à dégainer. Toujours la clope au bec,  toujours les yeux derrière une frange brune épaisse, toujours en jean, toujours coquette les ongles vernis et l’épilation parfaite, elle m’inspirait. Nous discutions longuement de choses et d’autres, d’une telle, d’une autre telle, elle était la reine des commérages sympas, elles connaissaient toutes ces dames depuis bien plus longtemps que moi, à quelques années près elle à l’âge de ma mère ! Elle me parlait très souvent de Marcel, son mari, un phénomène lui aussi. Alcoolique débonnaire, il était capable de piquer des colères monstrueuses sans qu’il soit possible de les voir venir. Je me souviens d’un dîner à la maison avec eux deux et un autre couple d’amis, épique! Je ne sais plus sur quoi la conversation a dévié mais manifestement elle ne faisait pas la joie de Marcel, il était entré dans une tirade acide fusillant du regard tous ceux qui l’entourait, il avait eu des mots  tranchants, incisifs, meurtriers à l’égard de sa femme et de toutes les femmes, il avait sorti l'artillerie lourde  et fichu en l’air la soirée d’un geste malheureux faisant valser toute la table de la salle à manger. Elle en était restée très meurtrie, elle avait eu honte, elle n'avait pas su comment restaurer l'image de celui qui partageait toute sa vie, elle lui en a voulu longtemps de ne pas avoir su se tenir ce soir là, d’autant que c’était la première et unique fois qu’ils venaient partager notre repas. Elle a toujours gardé une espèce de rancœur envers lui à cause de ce soir là et puis sans doute plus encore par la malheureuse répétition de ces débordements, elle m’en parlait souvent. Mais elle l’aimait, elle l’avait toujours aimé éperdument et puis c’était le père de ses deux enfants: Antoine et Louise.
 
C’est avec Louise d’ailleurs qu’elle est venue à l’inauguration de mon nouveau concept. Je l’ai trouvé changée, elle avait maigrie mais surtout elle avait souffert plus que de raison, c’était écrit sur son visage. Je l’ai quand même accueillie avec un « ça va ? » d’usage, elle m’a répondu par un cinglant « non ». 
 
- Tu ne sais pas que Marcel est mort ?
- Non, je l’ignorais, lui répondis-je confuse.
- Il y a deux ans, maintenant… Il avait guéri de son cancer de la gorge, tu te souviens ?
- Oui.
- Il a eu une rechute. Dans un endroit inopérable. Tu sais il passait des heures devant la télé, il a toujours été dépressif, tu te souviens de ça aussi ?
- Oui, oh que oui !
- Il ne mangeait plus depuis des mois, je lui apportais son plateau repas devant l’écran, il maigrissait, le chien lui grossissait… IL tentait déjà d’en finir. Il ne supportait pas l’idée de devoir repasser par là où il était passé, chimio, rayon, et puis perte du goût, de la voix, de tout… C’était l’anniversaire de Louise ce jour là, il paraissait jovial et, tu sais comme il pouvait être dans ses bons jours : drôle, convivial, altruiste, brillant. Il m’a dit de ne pas me laisser abattre, qu’on allait en venir à bout de toute cette merde, que notre fille était superbe qu’il fallait ne voir que le verre à moitié plein, qu’Antoine était maintenant reconnu pour son art, que ses toiles étaient si magiques, que j’étais la meilleure chose qui lui soit arrivée dans sa vie… Théâtral, sympathique, généreux, sensible, prévenant… Le soir je l’ai retrouvé dans la salle de bains, le visage en sang, il s’était tiré une balle dans la tête.
- Merde ! Quel courage !
- Oui, il se savait fini, il voulait pas que ça dure, il voulait pas qu’on le voit souffrir, il voulait pas nous imposer sa misère… Hein Louise ! Quand même ton père ?
- Un grand monsieur ! dit-elle du bout des lèvres.
- Tu t’imagines, le vide, Blue, tu connaissais l’énergumène, je me sens dépossédée de moi-même.
- T’as bien fait de venir, tiens, on va boire un coup à sa santé, à ses coups de gueule, à ses élans d’humanité, ok ?
- Ok !
 
Avec Geneviève et Louise, on s’est envoyé deux Caipirinhas coup sur coup. On avait toutes les trois les joues rouges et le regard brillant et puis on a parlé de l’avenir devant, du possible, de projets, du "je fais" plutôt que du "je verrais bien", de l’espoir et des leçons qu’on tire de ce que l’on doit vivre, de ce qu’on peut faire de sa vie, de tout ce qu’il reste encore à découvrir, d’avancer, d’enrichir et de donner, de donner beaucoup à ceux qu’on aime de leur vivant ainsi que de recevoir d’eux, d’être attentives, d’être présentes, d’être le plus possible vivantes ! Cheers, la Vie !
 
 

Jeanne

Elle a un peu plus que mon âge, cinq années de plus pour être tout à fait exacte. Je l'ai rencontrée, ici, à la boutique un soir d'été. Une de ces fins de journée étouffante en plein mois de Juillet. J'allais fermer ma grille quand elle a déboulée en sueur et en larmes. Je ne la connaissais ni d'Eve, ni d'Adam mais j'ai compris au premier regard que cette rencontre n'était pas fourtuite. Je suis allée lui chercher un cognac au bar juste en face, elle l'a bu d'un trait, s'est posée et a commencé à me raconter par bribes sa vie. Abandonnée au bord d'une route à l'âge de trois ans par sa mère, elle n'avait jamais connu son père. Jamais elle n'a réussi à savoir qui il était, jamais elle n'a revu sa mère depuis. Adoptée par un couple de notables argentés et charmants elle a eu une enfance dorée pleine de voyages, de divertissements, de culture et d'affection sincère et profonde. Ses parents adoptifs venaient de mourir l'un après l'autre à trois mois d'écart, elle se retrouvait vraiment orpheline pour le coup et avait du mal à encaisser la chose malgré un héritage confortable pouvant lui permettre de voir venir la vie jusqu'à la fin de ses jours sans se soucier du lendemain. Mariée cinq fois, elle eût une fille avec chacun de ses maris, elle s'apprêtait à quitter le cinquième pour retenter l'aventure avec un homme austère, érudit et terriblement amoureux d'elle. Faut dire que c'était une force de la nature cette fille-là, elle ne manquait pas d'attraits! Bavarde, enjouée, gourmande, drôle, brillante, elle avait repris à quarante ans des études de droit pour devenir avocate, ce qu'elle devînt. Dès lors elle prit la défense des enfants victimisés, notamment les cas d'inceste. Elle en ignorait la raison mais c'étaient les seuls cas pour lesquels elle avait du coeur à l'ouvrage. Elle excellait à défendre ses petites victimes.

- Je ne sais pas pourquoi je vous raconte tout ça à vous, ma vie, mes erreurs, mes détresses, mes aspirations. Je ne sais pas pourquoi je suis entrée dans votre boutique ni pourquoi c'est dans vos bras que je pleure. Mais ce que je sais, c'est que ça me fait drôlement du bien!

- Parfois la vie met sur notre chemin des solutions incroyables. Cette rencontre en est l'illustration!

- Je m'appelle Jeanne, je ne crois pas vous l'avoir dit, c'est bête, c'est ce par quoi j'aurais dû commencer, non?

- Moi, c'est Blue.

- Blue! C'est joli, c'est votre vrai nom?

- Non, j'ai été rebaptisée ainsi par un très bon ami, depuis j'ai adopté ce nom inspirant et coloré, je l'aime.

Nous avions bavardé au moins deux bonnes heures, peut-être davantage, sans voir le temps passer. Nous avions l'impression l'une comme l'autre de nous connaître depuis la nuit des temps, depuis toujours, depuis avant d'être nées, c'est étonnant comme il est des gens avec qui le courant passe tout de suite, avec qui l'intimité s'installe au premier regard et la confiance au premier mot. Nous nous sommes revues pas mal de fois les dix années qui ont suivies et puis depuis deux ans je n'avais plus de ses nouvelles sauf par une connaissance commune qui m'avait annoncé son cancer du pancréas. J'ai tenté vainement de la joindre, mais elle s'était isolée du monde pour mieux se battre, coriace. Une fois je l'ai croisée par hasard dans la rue, ombre d'elle-même, chauve, amaigrie, sans lueur au fond des yeux, et tendue par la douleur.

- Ah Blue! C'est difficile, c'est une souffrance de chaque instant, mais faut que je tienne, faut que je me batte, qui sinon va s'occuper de mes filles?

Je n'avais pas les mots, je l'ai juste prise dans mes bras, elle semblait si fragile. Que pouvais-je bien lui dire pour qu'elle garde la foi?

Jeudi soir, j'ai appris au cours de la soirée organisée à la boutique pour le lancement de Lilith qu'elle était aux soins palliatifs de l'hôpital depuis une semaine, qu'elle avait rendu les armes, qu'elle ne souffrait plus, qu'elle se préparait doucement à dire au revoir à tous les gens qu'elle avait aimés. J'ai appris que son dernier amant était lui aussi atteint d'un cancer des os et qu'il prenait le même chemin qu'elle. J'étais là assise sur les marches de mon escalier en fonte qui trône au centre du magasin, un escalier récupéré dans une ancienne brasserie par un cultivateur du coin et qui me l'avait offert, pourvu que j'en débarrase son champ, vingt cinq ans auparavant. J'étais là assise sur les mêmes marches au même endroit que la première fois où je l'avais vue, j'entendais notre amie commune me raconter le calvaire de Jeanne ces derniers mois, sa force de caratère, son courage, sa lutte et en l'écoutant je la revoyais, elle, me parlant gesticulant de tous ses membres, tantôt me chuchotant ses misères, tantôt me les fracassant dans des éclats de rires nerveux. Je la revoyais dans sa robe écarlate, son cognac à la main, mordre la vie, la transpirer, l'accueillir de tout son corps de femme et maintenant j'avais au fond de la poitrine un noeud si gros à la penser mourante, décharnée, immobile avec à peine la force de s'exprimer.

J'y suis allée.

- Ah Blue, c'est toi?

- Oui, Jeanne, ça fait un bail n'est-ce-pas?

- Tu te souviens la première fois qu'on s'est vu? Un truc de dingue, hein? 

- Un truc de dingue, en effet!

- T'avais pas pu en placer une, je parlais, je parlais, je parlais, j'arrivais pas à m'arrêter de parler, et toi, assise sur ton escalier, tu m'écoutais, tu m'entendais, tu me soutenais du regard, tout ça sans même savoir qui j'étais! Un cognac! j'avais encore jamais bu de ce breuvage! Pourquoi est-ce que tu es allée me chercher un cognac?

- Je ne sais pas, c'est la première idée qui m'avait traversé l'esprit, tu semblais tellement chamboulée!

- Je suis passée à la morphine maintenant, il n'y a que ça qui me calme. Je vais mourir, Blue, je n'en ai plus pour très longtemps. J'ai dit au revoir à mes enfants, elles sont grandes tu sais maintenant, c'est presque des femmes! Elles ressemblent tellement chacune à leurs pères, c'est fou! De moi elles ont pris la gnaque et le verbe, elles sont toutes si bavardes, tu les verrais!

- C'est vrai, t'as toujours eu un sacré débit! C'est sans doute pour ça que tu gagnais presque tous tes procés!

- J'ai bien oeuvré, j'ai voulu rendre ce qui m'avait été donné, j'ai eu beaucoup de chance dans ma vie, j'ai été vraiment aimée et j'ai aimé beaucoup et j'aime tant encore. Je peux partir sereine. Une vie courte mais une vie pleine!

 

Je suis sortie abasourdie. Et j'ai pensé, pas de temps à perdre, j'ai encore tant à faire avant de passer de l'autre côté. Vivre le moment présent à fond, intensément et goûter à la chance de pouvoir être en vie totalement. Même si je la sais inexorable, je ne suis pas pressée de rencontrer la grande faucheuse. Au boulot!

 

 

 

18/03/2012

tu verras

Merci MmwH!, vieux corsaire indomptable...