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21/03/2013

aparté

C'est quoi au juste, "vivre sa vie"? Cette question me déroute. Peut-on en vivre une autre et ne pas vivre la sienne, ou attendre d'ailleurs ou d'autrui de nous faire vivre vraiment? J'ai longtemps, trop, très, oublié de vivre la mienne sans pour autant ne pas la vivre vraiment, c'est complexe. Alors si ce sentiment de ne pas vivre sa vie, ce sentiment pressant d'être en-deçà assaille, ben faut réagir dare-dare et tenter l'improbable, enfoncer, avancer, se surprendre... Je ne connais rien de meilleur que d'avoir pris des risques. Rien de meilleur non plus que d'en prendre toujours...

 

Carole Melmoux

« Oublier pour vivre et se souvenir pour créer, créer c’est se souvenir c’est puiser dans notre mémoire, c’est se laisser traverser par le passé pour qu’il se taise un peu en nous et qu’il parle en dehors de nous. Créer c’est aussi oublier ce que l’on sait pour laisser s’exprimer l’inespéré. » 

- Carole Melmoux -

 

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20/03/2013

Le printemps est inexorable*

 

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" J'ai su avec les yeux ouverts plus grandement sur les choses que la vie que nous déployons peut aussi révéler de la joie."

- Odilon Redon - 

 

* Pablo Neruda

 

18/03/2013

nous ne sommes presque rien

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- Martha Graham, cave of a heart d'Isamu Noguchi -

 


podcast

- Liane Foly - Nous ne sommes presque rien -

 

17/03/2013

Mode

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- Photo Laurence Guez -


J'ai promis de parler de la Fashion Week. Chose promise... Le métier que j'exerce est loin des podiums, loin des effets de style, loin des longilignes évanescences que je croise, loin de toute cette poudre aux yeux, loin de l'image qu'on renvoit de la femme, loin des magazines, loin des "must have", des "it bags", loin des clichés. Je suis une femme de terrain. 

Je croise des stars, des créatures, des créateurs, des insensés, des beaux parleurs de la matière, des fous dingues achevés du style, du genre, du comment il faudrait être, de l'élégance incarnée. Tout cela m'amuse, me stimule aussi, donne matière à mon roman en cours mais tout cela est loin, mais loin de chez loin de la réalité. C'est normal! On a fait de la mode un art! Sauf qu'en fait la mode n'en est pas un, c'est un art appliqué et c'est à ce moment là qu'elle devient vivante et c'est à ce moment là, qu'elle me plait.

Quand je parle de la Fashion Week, beaucoup s'imaginent sans doute que je me laisse aller aux divagations qu'on me propose, qu'entre deux coupes, je m'enivre au taffetas rose ou à la création hallucinante d'un nouveau tailleur de Karl! Folklore! Mon métier est plus simple et plus compliqué aussi. Je tente de trouver ce qui va pouvoir plaire, va pouvoir seoir, va pouvoir embellir, séduire et convenir à ma cliente future. Je tente d'innover, d'extrapoler ses besoins. J'explore et je m'engage. C'est pas de la blague! C'est du concret. On ne vit pas d'amour et d'eau fraîche, pas vrai?

J'aime ce que je fais, j'aime embellir les femmes, j'aime qu'elle se sentent mieux, qu'elles aient un regard plus doux et plus aimants sur leur corps et qu'elles se permettent d'être comme elles le souhaitent. Je suis récompensée quand elles se plaisent et quand elles se voient belles. Pour moi c'est le rôle du vêtement, permettre à tout à chacun de s'exprimer et d'exister. D'être au mieux. De s'aimer.



15/03/2013

une journée pas ordinaire

On en parle depuis, quoi, deux ou trois ans. Les projets fusent chaque fois que l'on se voit et puis finissent dans un tiroir. Bon, j'allais pas fort ce jour là, des vieilles remontées que je ne peux pas gérer tant elles me submergent, mais je m'y fais, on se fait au meilleur comme au pire, on se fait à la vie, on se façonne avec. Elle m'est rentré dedans avec ses mots et puis a débarqué, caméra au poing.

- Tu sais, je te vois en haut d'un terril!

- Un terril, t'es sûre?

- Ouais! Même que tu cries, que tu as les bras en croix, que t'es rageuse à mort!

- Ah! Oh! Ouch! Et je fais quoi au juste en plus d'éructer?

- Ben... tu ES!

- Ben, OK!

 

La journée, celle qui vient de se passer fut juste comme un rêve... Une séquence troublante et particulièrement émouvante avec ma tasse de thé, une autre, juste incroyable les deux mains dans la terre noire et une troisième séquence digne d'un Tarkovski en mode Anna près de Carvin dans le Pas de Calais où là, je suis montée, j'ai grimpé le bazar et j'ai hurlé au sommet comme je le faisais ado, tout ma rage d'enfant blessé. 


Ahmad Wali

 

ce que j'ai vu en rêve

 

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- Photo Laure K. -


12/03/2013

C'est le Nooooord!

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 Ma petite cour hier matin vers 9 heures, un film de sucre glace recouvre tout...


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La même, mais ce matin, à la même heure!!



Toute la journée d’hier et toute la nuit d’aujourd’hui il a neigé. Flocons après flocons, tout s’est recouvert d’un épais manteau blanc. A dix jours du printemps ! C’est beau, c’est blanc, c’est apaisant mais ça n’est pas le pied quand on est commerçant !! Pas de bus, pas de métro, le tramway est à quai, les trains restent dans la gare et les gens… chez eux. Moi-même je ne peux pas me rendre sur mon lieu de travail, la porte d’entrée de ma maison s’ouvre sur un mur de neige, le vent a balayé la poudre dans tous les recoins, impossible de bouger, impossible de sortir, coincée, immobilisée.

 

« La mort couve la vie sous manteau blanc


Enigme incertaine d'une venue


Nouvelle des caresses des amants


La fonte des neiges sur leurs corps nus.… » 

 

Alors, plutôt que me morfondre, râler, faire la tête ou en vouloir à celui qui là-haut nous envoie ce tapis sucre glacé, je me suis mise à la fenêtre et j’ai laissé mon esprit rêvasser à mes amis du Québec. Eux, le froid, les congères, la neige en masse, ils connaissent bien. Une petite épaisseur de trente centimètres, ça doit les faire sourire en coin. C’est presque rien… Mais pour nous ici, c’est limite la fin du monde. Un nombre incroyable de foyers n’a plus l’électricité, les routes ne sont pas dégagées, personne n’est équipé. Et comment je vais faire pour vendre de l’été, des petites robes légères, des chemisiers en voile, des pantalons corsaires, des petites jupes en lin ? La semaine dernière, c’était le printemps enfin, les petits oiseaux nous faisaient leur refrain et les femmes avaient des envies de changement, de couleurs, de mouvements. Là c’est sûr, chacune doit maugréer à devoir remettre des chaussettes, des collants, des gros pulls ou rester sous la couette plutôt que de s’ouvrir à la douceur du temps.

C’est étrange comme les changements de saison influent sur notre inspiration. On est forcément différent suivant le climat dans lequel on se pose. J’imagine dans les pays où il fait toujours chaud ou ceux où à l’inverse il fait toujours froid. L’individu n’est forcément pas le même. Et nous qui connaissons des saisons et qui avons le printemps et l’automne pour avoir des émotions comme personne, nous sommes chanceux, au fond…

 

« Les sanglots longs 
des violons
 de l'automne
 blessent mon coeur 
d'une langueur
 monotone. »


« Avril, dont l’odeur nous augure


Le renaissant plaisir,


Tu découvres de mon désir 


La secrète figure. »


Alors, impatiente de voir venir cette fonte prévue dans les jours qui viennent, c’est drôle comme soudain la météo prend une place énorme, je recompte mes commandes pour l’hiver prochain. Ici, c'est le Nooooord!

 

11/03/2013

Wilhelm Hammershøi, peintre de l'intime

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Descendant de Vermeer ou précurseur de Hopper ? Hammershøi, peintre danois dont la notoriété s'affirme dans les années 1880, est sans doute l'un et l'autre. L'intimisme minimaliste de ses intérieurs aussi bien que l'atmosphère trouble qui se dégage de son apparent rigorisme en témoignent suffisamment.

Hammershøi a sans doute inventé le portrait de dos, comme il existait un portrait de face ou de profil. Cette femme assise - dont on ne saurait dire s'il s'agit d'une bonne ou d'une bourgeoise, ni même deviner ce qu'elle est en train de faire - attire par son indifférence affichée vis à vis de celui qui la contemple. Au personnage silencieux correspond une gamme très raffinée de gris et de bruns, qui montre la sensibilité profonde du peintre aux atmosphères intérieures.

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 La composition est toute en angles droits : les lignes de la chaise, de la plinthe, de la desserte quadrillent cet éloge de l'absence avec une rigueur toute protestante. Mais il ne faut pas en conclure trop rapidement que cette toile est une allégorie de la solitude ou du tragique humain. Car Le vrai sujet en est peut-être la nuque, partie du corps la plus indécente dans l'imaginaire oriental. Aussi bien ces rares mèches folles, l'ouverture de la blouse laissant apercevoir la blancheur du dos, en contrepoint de la coupe en forme de fleur posée sur le meuble, constituent-ils les antidotes radicaux à la tentation d'une lecture platement puritaine. (Source Musée d'Orsay)

 

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" Il n'y a rien que cet espace enclos dans les lignes minuscules et vertigineuses du parquet, du plafond, la symétrie des moulures sur les murs, un parallélisme obsédant qui se cherche des points de fuite, une ouverture. Une lumière exsangue et bleue, fatiguée de se frayer un chemin à travers des rideaux, des tentures, des bibelots espacés, respectables, inutiles. Et puis cette nuque un peu penchée... Froide ou chaude ? C'est dans l'incertitude que la sensualité progresse, en silence, en secret. "

- Philip Delerm - Intérieur -



10/03/2013

Drôle de Dimanche

Réveil normal, tôt, amical. Rien ne semblait pouvoir ombrer cette journée froide et humide dehors mais chaude et chaleureuse dedans. Poulet-purée habituel. Discussion et échange en famille aussi. On décide de voir un film. " La taupe", le film de Thomas Alfredson. Le matin entre le thé et le déjeuner j'avais été remuée par un documentaire sur Yves Saint Laurent et Pierre Bergé que Pat m'avait enregistré, me suis pas méfiée! Quand la Taupe est arrivée, j'ai fait un malaise, submergée. Saleté d'inconscient. Bon, pas de panique, je connais la chose, quand elle veut s'exprimer elle n'a pas d'heure. Me suis couchée. Me suis réveillée trois heures après, la langue pâteuse et surtout les idées grisées. Et plein d'options dans la tête! Un dialogue intérieur, une sorte de mal être, toujours ces vieux démons qui hantent mon esprit et puis aussi ces questions lancinantes: c'est quoi tout ce tremblement, qu'est-ce que je fous, à quoi je sers, suis-je vraiment aimable, aimée? C'est idiot. Je le suis. Mais j'en doute. Parce que je doute de ce que je suis. Je sais, ça commence à bien faire, ça fait quatre années que je dis ça ici, que je cherche, que je creuse, que j'escamote. Mais bon, c'est comme ça. Je tiens le bon bout mais un élastique m'empêche de vraiment couper le cordon. J'ai mis au monde trois beaux gars, magnifiques et denses. Je vis avec et tout contre un homme fabuleux. J'ai des amis formidables, des amours, je me réalise peu à peu, une sorte de course à l'échalotte! Je veux vivre ma vie, la vie telle qu'elle m'est donnée à fond, jusqu'au bout. J'ai besoin d'oeuvrer. De dire. D'écrire. Je ne suis pas poète mais j'y suis sensible...

"Le poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens. Toutes les formes d'amour, de souffrance, de folie ; il cherche lui-même, il épuise en lui tous les poisons, pour n'en garder que les quintessences. Ineffable torture où il a besoin de toute la foi, de toute la force surhumaine, où il devient entre tous le grand malade, le grand criminel, le grand maudit, - et le suprême Savant ! - Car il arrive à l'inconnu ! - Puisqu'il a cultivé son âme, déjà riche, plus qu'aucun ! Il arrive à l'inconnu ; et quand, affolé, il finirait par perdre l'intelligence de ses visions, il les a vues ! Qu'il crêve dans son bondissement par les choses inouïes et innommables : viendront d'autres horribles travailleurs; ils commenceront par les horizons où l'autre s'est affaissé!"

- Lettre du voyant - Arthur Rimbaud -

 

Une pensée pour VieuxG.

Boris aurait aujourd'hui 93 ans, et je sais qu'il l'adore...

 

 

 

" Ce qui m'intéresse, ce n'est pas le bonheur de tous les hommes mais c'est celui de chacun."

- Boris Vian - L'écume des jours - 



09/03/2013

ce matin, une phrase me traverse l'esprit

 

"Nous ne sommes fait que de ceux que nous aimons et rien d'autre."

- Christian Bobin -


07/03/2013

partage

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- Masque Mukuji Okuji- Punu- Gabon -


 

" Chacun pleure à sa façon le temps qui passe."

- Louis Ferdinand Céline -



06/03/2013

The slav epic

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Le musée Mucha à Prague est petit et mignon, il m'avait laissé sur ma faim. Je pensais voir autre chose d'Alfons, je m'attendais à une émotion forte avec ce que j'avais tenté de comprendre de lui avant de partir ces quatre jous bénis. Finalement je n'ai pas été décue. L'exposition de son épopée slave au rez de chaussée du palais Veletrezni est magnifique et monumentale. Imaginez, vingt immenses toiles célébrant l'histoire slave depuis le début du 19ème siècle. La sensation face à ces tableaux est intense, on se sent immergé dedans.

 

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Alfons Mucha a consacré dix huit années à élaborer et produire cette oeuvre gigantesque pleine de poésie qu'il a offert à la ville de Prague. Un philantrope américain riche et admirateur enthousiaste de la culture slave a financé son projet et lui a permis de le mettre en oeuvre. Avant de s'y mettre il a visité les lieux qu'il avait envie de dépeindre et a consulté des historiens sur les détails des événements pour être certain de rendre au plus près une représentation exacte de ce qui c'était passé. Fascinant. Bourré de détails, on entre dans ses tableaux comme dans une pièce de théâtre. Les robes, les étoffes, les costumes, les coiffes, tout est léché et rendu avec soin et une certaine sensualité. Il se dégage une intensité étonnante liée à une sorte de lumière intériorisée et on a presque l'impression d'entendre les toiles jaser et nous dire des histoires. Au cours de cette expo, je me suis sentie comme dans un grand livre d'images.

 

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Au milieu de ces grands tableaux, seule pratiquement avec eux, certains détails, certaines expressions de visage, certains mouvements ont plus attiré mon attention que d'autres. Chaque fois que je passais devant tel ou tel personnage, il me semblait l'entendre: " Hey, regarde-moi! Comprend ma douleur, ma terreur ou ma joie!"

 

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Après plusieurs heures, j'avais le sentiment de mieux comprendre comment la vie à l'époque avait pu être, intense, déchirante, cruelle et belle. Folie. Folie aussi ce travail qu'a entrepris là Mucha, fou et colossal. Fou de penser que pendant plusieurs années ses toiles ont été enveloppées et cachées pour empêcher la saisie des nazis. Fou aussi l'immensité de l'endroit qu'il faut pour laisser voir un tel opéra. Je ne regrette pas d'être passée par là...

 

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28/02/2013

fééries intérieures

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- Toile Tony Toste -

 

25/02/2013

L'instinct de ciel

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"De quelle sorte de barque est la langue? Pour traverser, pour s'en aller, ou simplement pour se tenir en équilibre sur le bleu. Des planches clouées, du bois taillé: il faut un arbre ou plusieurs pour aller sur la mer. Il faut du sol et des racines. Le bonheur de vivre là-bas, puis à coups de hâche la furie d'abattre et de décortiquer. Il faut avoir aimé les souffles de la langue, ses feuillages et ses chants. Puis cisaillé ses branches, détruit ses nids et chassé ses oiseaux...

Telle est la fable de qui s'en va. De qui s'est fabriqué l'esquif de la disparition. Il faut avoir un peu de terre sous les semelles pour marcher sur la mer."

 

- Jean-Michel Maulpoix -


20/02/2013

Après birthday

Hier, j'ai pris un an. C'est pour moi toujours une épreuve que cette journée, depuis un bail, à croire que c'est un souvenir que j'aimerais oublier, mon birth day! Réveillée à 4h du mat - j'ai des frissons, je claque des dents et je monte le son - par une froidure peu commune dans tout mon grand corps épuisé et malgré des tentatives désespérées pour me réchauffer (bain brûlant, grog fumant, massages violents) c'est le texte de Christian d'abord, puis la note de Laure et les pensées de Laurence qui ont réussi à vaincre ce froid intense. Seul un peu d'amour vrai, chaud, vivant pouvait remettre sur pied ma carcasse défaillante. Suis allée vers 6h30 du mat me remettre au lit avec mes petits doudous dans l'esprit. Cocoon. A 11h, mon homme déboule anxieux: "il est l'heure, il est l'heure, debout! Bon anniversaire, mon amour!" L'heure! J'étais déjà en retard d'une bonne demi. La boutique ouvre à 10h30 et suis encore au lit! Je me précipite, grelottante toute entière à nouveau, m'habille, me maquille en deux coups de cuiller à pot, avale sur le pouce une tartine beurrée, un thé vert parfumé d'Earl Grey et j'y vais. Mon petit dernier fait un stage en entreprise d'une semaine chez moi, suis rassurée, je serai pas seule toute la journée. Elle a défilé comme pour rire: papiers, réception de colis, rangements en tout genre, ménage de printemps, déferlante de coups de fil, quelques ventes. Quelle joie quand j'ai vu mon fleuriste préféré m'amener ce gros bouquet de tulipes blanches! Que c'est bon d'être aimée! Pourtant j'ai toujours si froid, si froid dedans, grand Dieu mais pourquoi ai-je à ce point froid? J'ai les mains gelées. Je découvre avec bonheur au cours de la journée quelques mails d'amis de coeur et des messages tendres de personnes qui me sont chères, chaque fois j'ai ma pichenette de chaleur mais le froid abyssal prend toujours le dessus, "Blue, pourquoi ce grand froid dur en toi?" 19 heures arrive enfin, il y a des jours comme ça on ne profite pas de l'instant présent on aspire déjà au lendemain, ça se fait sans qu'on y pense, peut-être un moyen de moins souffrir ou de moins réfléchir, est-ce que je sais? Nous avions prévu d'un commun accord d'aller toute la famille manger dehors un couscous chez notre ami Momo. Toujours aussi hivernale de l'intérieur je reprends un ultime bain chaud avant de me retrouver avec deux de mes fils, la chérie de l'un d'eux et mon homme au restau. L'ambiance chaleureuse et aimante, le vin, la bastilla de pigeon me remettent un peu de chaleur dans les veines, j'ai l'impression de revivre un peu et puis Peter me tend un paquet bleu. Je connais bien ce papier brillant double face, bleu et argent, c'est celui que j'utilise depuis des années à la boutique pour les emballages cadeaux. J'ouvre délicieusement le paquet et je suis tellement touchée par ce que j'y trouve que d'un seul coup mes lunettes de vue s'embrument. Un carnet Moleskine, grand format comme je les préfère et un stylo design acier chrome et ébène. J'ai le coeur qui bat la chamade. J'ouvre l'objet, deux dédicaces à l'intérieur du carnet. George et Peter m'on chacun écrit un petit mot doux. Là, impossible de me contrôler, mes larmes se bousculent et se transforment en gros sanglots longs, les mots de mes enfants me bouleversent d'émotion. Et aprés avoir passée ma journée à dire que j'avais froid, là d'un seul coup je m'éclate dans un "ce que j'ai chaud!"...

 

16/02/2013

lettre à K.

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Cher Franz,

je reviens tout juste de votre ville de Prague, la grande Praha, si magique à la tombée de la nuit. Je l'ai traversée de long en large, montant, descendant, usant mes semelles sur ses mosaïques de petits pavés gris et blanc qui changent tous les dix métres et j'ai bravé la neige, le vent, le froid pour découvrir et ressentir cette cité mythique que beaucoup de guides touristiques donnent pour une des plus belles d'Europe avec Paris et puis Venise. Je ne sais dire, la beauté est si subjective. Pour moi elle est si dépendante de l'état d'esprit dans lequel on est et tellement liée à des idées qu'on se fait des choses. Difficile à dêméler. Praha n'est pas époustouflante de beauté comme peut l'être Rome ou Florence, du moins à mon humble avis mais elle dégage une sorte de mystère qui agit progressivement au fur et à mesure qu'on la découvre. C'est sans doute l'euphorie architecturale qui donne à cette cité un ton particulier, tous ces bâtiments qui s'entrechoquent et s'entrecoisent, tous plus chargés les uns que les autres en sculptures, en fresques, en ornements, avec en contraste, parfois, au milieu de cette opulence gracieuse un bâtiment austère, cubiste, à la serpe venant calmer le jeu. J'ai adoré tenter vous comprendre mieux en marchant sur vos pas. Comprendre dans quel état d'esprit vous pouviez être, tenter de me mettre à votre place dans vos endroits. Saviez-vous qu'un musée à votre intention a été créé, un musée qui tente de rendre votre angoissant univers et la tristese infinie de votre oeuvre? Je n'ai pas visité cet endroit, j'ai préféré mille fois baguenauder dans la Ruelle d'or, le long de la muraille nord du château qui domine la ville, cet "amas de petites maisons délabrées" je vous cite, dans lesquelles vous avez vécu au numéro 22 et qui semble vous avoir inspiré. Rénovées depuis, impressionnantes de petitesse, ces maisonnettes incongrues pas plus hautes qu'un homme, et plutôt un homme de petite taille, renferment une sorte de magnétisme, j'ai particulièrement été touchée par celle de la diseuse de bonne aventure, Matylda Prusova, plus connue sous le nom de mystique Madame de Thébes qui malgré la perte de son fils à la guerre de 14 continua à lire dans sa boule de cristal leurs fortunes aux gens du peuple. La pauvre, ayant prévu la chute du Troisième Reich, est morte aux mains de la Gestapo. La minuscule pièce qui ne contient qu'un divan recouvert d'un tapis d'Orient cramoisi, un guéridon rond, une chaise et un bureau sur lequel trône un crâne humain blanchi ressemble à un confessional, il a du s'en dire des choses dans cette alcove propice aux confidences. Et puis, surtout, pour mieux vous suivre, j'ai erré dans les cafés de la ville. Et là, je peux bien vous le dire tout de go, je me suis régalée. Le café Louvre d'abord, celui où vous aviez votre rond de serviette au premier étage de la rue Nationale, avec ses murs rose et crème, ses moulures en stucs néo-rococo, ses grands luminaires en vasque d'albâtre où le temps d'un chocolat chaud, onctueux à souhait, on retrouve l'art de vivre chaleureux et cosy de la Belle Epoque. Vous ignorez sans doute que cet endroit qui permettait aux visiteurs, dont vous faisiez parti, d'user du téléphone comme bon leurs semblaient et dont certains étaient passés maître dans l'art de s'y montrer passant parfois plusieurs coups de fil bruyants au cours d'une même soirée, a été fermé en Mai 1948 par les communistes pour en faire des bureaux et n'a été réhabilité qu'un 1992? Albert Einstein y avait aussi ses habitudes, ainsi les arts, la littérature et la science se côtoyaient autour de cafés et de mets. Votre ami Brod fut exclu du cercle philosophique qui y siégait? Diable, et pourquoi donc? Remarquez cela ne vous a pas empêché de continuer à visiter votre café préféré! J'y suis resté pendant quelques heures à regarder déambuler de table en table des corps masculins tendus dans de seyants gilets noirs, attentifs au moindre désirs des personnes attablées. Ce qui m'a frappée outre le décor, c'est qu'on peut y fumer. Et plus encore c'est dans le coin fumeur que la vie se fait plus active, à croire que la cigarette délie les langues et rassemble les individus. J'ai vu plusieurs groupes de femmes entre elles riant à gorges déployées, deux vieux copains qui semblaient en veine de se dire, et, tout près de moi, j'ai observé un long moment un monsieur d'un certain âge, mèche grisonnante, veste à carreaux plutôt criarde, en jeans comme la plupart des gens dans le lieu, se levant d'un bond à chaque fois qu'une grande brune faisait son apparition et se rasseyant dépité, la belle ne venant jamais dans sa direction. Je crois bien que tout son paquet de blondes y est passé. J'en étais presque désolée pour lui et aurais donné cher pour connaître son affaire, mais il ne parlait que tchèque. Quelle langue improbable! Impossible de s'y retrouver. Je serai bien incapable, Franz, de vous lire autrement que traduit en français, l'allemand est plus abordable que le tchèque mais est encore beaucoup trop une montagne pour moi. M'étant bien imprégnée du Louvre, il me restait vous concernant à visiter le Slavia. Magnifique endroit! Vaste, éclairé, de grandes baies s'ouvrant sur la Valtva, fleuve plus connu sous le nom de Moldau, avec un point de vue magique sur le château et la cathédrale trônant en hauteur derrière la multitudes de ponts rythmant ainsi l'image de carte postale quelle que soit l'heure. Le Slavia m'a plus fait songer à la Coupole de Paris, le genre grande brasserie truculente, symbole de l'histoire tumultueuse de la ville et de sa très riche vie intellectuelle, de sa façon de vivre, de se penser, de parler de soi. Ici, aussi, le personnel est en frac, à l'ancienne, tout comme le vestiaire à l'entrée. Les traditions sont respectées! Faisant face au théâtre national, ce lieu a accueilli nombreux intellectuels et artistes, on le sent fortement, il y a une liberté d'expression et une décontraction tout a fait sympathique invitant l'esprit à gambader et gamberger. Là aussi, j'ai stationné, n'en pouvant plus, je veux bien vous l'avouer de marcher et marcher encore, de musée en musée, 700 parait-il, rien que pour votre ville! Je ne les ai pas tous arpentés, de tous ceux que j'ai eu envie de faire, c'est le Veltrzni Palac, immense bâtiment construit dans le style constructiviste à l'autre bout de la ville qui m'a le plus secouée. Mais je vous en reparlerai, j'y ai fait une découverte si émouvante qu'il faudra bien une autre missive pour vous ne parler que d'elle, j'y suis encore, par la pensée. Oh! C'est que pour aller jusque là il m'a fallu prendre le métro. Je n'avais jamais encore pris un escalator aussi raide pour investir les entrailles de la terre. Quelle émotion! Mais,revenons à vos cafés. Aux cafés de votre ville sourde et gracieuse qui se découvre petit à petit. Hier, dernier jour de ma visite, j'ai voulu prendre un dernier liquoreux chocolat chaud dans le seul café cubiste au monde. Vraiment tous les styles se côtoient dans cette ville: roman, gothique, baroque, art nouveau, art déco, cubiste... A nouveau à l'étage, c'est le mobilier bien sûr qui m'a attiré l'oeil jusque dans les moindres détails: patères, poignées de porte, luminaires. Je n'ai pas tellement aimé les jupettes vertes en abat-jour sur les grand lustres de métal forgé mais par contre la rigueur et la pureté des tables et des sièges méritent le détour. Finalement pour nous, ce qui était sans aucun doute avant-gardiste à l'époque est devenu presque dépassé voire un tantinet vieillot mais c'est rigolo de se replonger ainsi dans des ambiances totales jusqu'aux tasses à café, on a un peu l'impression d'être dans un décor de ciné et de faire de la figuration. J'y ai vu une jeune femme slave de toute beauté, perdue dans ses pensées, seule, écrivant sur son petit carnet noir des bribes de choses et d'autres, sirotant entre deux coups de stylo son cappucino. J'avais pour ma part à la main un de vos livres, Un artiste de la faim à la colonie pénitentiaire et autres récits, votre médecin de campagne m'a fait froid dans le dos, et "Un rêve", Joseph K. rêvait, m'a subjuguée. Je ne vous avez plus lu depuis pas mal d'années, le dernier livre que j'ai repris de vous il y a peu était lettre au père qui m'avait inspiré une lettre à ma mère beaucoup moins dense, pour, comme vous l'écrivez vous-même "rendre à tous deux la vie et la mort plus faciles", pensez-vous cela possible? Je veux y croire même si parfois encore j'en doute. Je ne sais s'il est possible d'extraire de soi tout le poison que notre éducation nous a "intraveiné". D'ailleurs, je ne veux pas vous ennuyer avec ça mais j'ai fait pas mal de cauchemars entre vos murs, je me suis demandée s'il n'y avait pas une alchimie particulière qui m'a ainsi ramenée aux fantômes du passé. Comment séparer les choses qu'on décide et celles qui se décident malgré nous? Cher K., en tout cas, ces quelques jours en votre compagnie furent un régal et Prague sous son grand manteau blanc une poétique découverte pleine d'instants que je garde en mémoire comme des petits trésors brûlants. Merci d'avoir été et d'être encore au travers de vos mots aussi remuant.

Bien à vous.

Blue

 

08/02/2013

Danse harmonique

danse harmonique - la rouge-.jpg

- Acrylique sur toile - La Rouge -


 

" Entre deux individus, l'harmonie n'est jamais donnée, elle doit indéfiniment se conquérir."

- Simone de Beauvoir -